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Les Eurockéennes

Belfort

Les Eurockéennes

Les 29, 30 juin et 1er juillet

par Aurélien Noyer le 4 septembre 2007

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Se lever tôt, courir pour choper le train, arriver à Belfort, attendre la navette, marcher jusqu’au camping en portant sac de couchage et tente, récupérer le bracelet du camping, installer la tente, se reposer un peu, marcher jusqu’au site du festival, faire la queue pour récupérer le bracelet Presse et attendre à l’intérieur Vyvy et Béatrice qui n’avaient la chance d’avoir le bracelet magique...

Après toutes ces péripéties qui s’étalent tout de même sur une demi-douzaine d’heures, nous sommes enfin à l’intérieur. Vyvy, Béatrice et votre serviteur, prêts à couvrir les Eurockéennes pour votre webzine favori. Malheureusement, notre intention d’invoquer l’esprit du bon vieux Hunter Thompson s’effacera devant le prix des bières et le fait que notre chargement personnel ne nous autorisait pas l’apport de bière. Nous nous contenterons donc de la bouteille de vin-fraise préparé la veille... Mais trêve de digression. Revenons-en à notre festival. Nous voilà donc à l’intérieur, ne restait plus qu’à choisir...

Eurockéennes Jour 1

Premier groupe possible, Kaolin. Mais un rapide échange de regard nous suffit pour tomber d’accord et nous avons donc soigneusement éviter les Français. Et par curiosité, nous nous sommes rabattus sur les Hellbats, groupe français de "Heavy Rock", présentés comme tels par le programme. Quelques minutes d’attente sur la Plage, scène établie directement sur la plage au bord du lac. Les pieds dans le sable, nous attendons en contemplant les très jolies chauve-souris stylisés qui décorent la scène... Et puis, ça commence. Le groupe entre sur scène sur le thème de Batman (le film, pas la série télé... donc le thème de Danny Elfman, pas celui de Neal Hefti). Pas mal pour débuter un show, sauf que ça va très vite se gâter. En effet, si je ne sais pas vraiment si on peut qualifier leur musique de Heavy Rock, je pense qu’on peut traduire l’expression et parler de Rock Lourdingue. Riffs ressassés, soli mille fois entendus et une (très) déplaisante habitude d’en faire des caisses. Head-banging à répétition, bassiste qui ne peut s’empêcher de lever le poing avec l’index et le petit doigt tendus... Une vision un peu pathétique, mais en les regardant, j’ai une étrange sensation de déjà-vu. Et soudain, je sais !!! Ces mecs sont une véritable caricature des personnages du jeu vidéo Guitar Hero. Et sachant que ces personnages sont déjà des stéréotypes du rockeur de base, c’est peu flatteur. Toujours est-il que, atterrés par ce spectacle, nous ne tardons pas à nous éloigner.

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Hellbats

La prochaine attraction sera donc Juliette & The Licks. Sous le chapiteau, il est difficile de dire si la foule se presse en connaisseurs ou simplement pour voir Juliette Lewis sur scène. Car la demoiselle a de la ressource. Elle crie, feule, se contorsionne. On sent qu’elle a lorgné du côté d’Iggy Pop. Par contre, niveau musique, il faudra se contenter du strict minimum : du rock basique, un peu rugueux, sans d’artifices. C’est assez rafraîchissant si on songe aux groupes de rock fondés par des acteurs (Jared Leto par exemple) qui ont bien souvent tendance à produire des horreurs formatées à l’extrême ou ultra-produites. Si ce n’était la popularité de Juliette Lewis, on verrait très bien Juliette & The Licks jouer dans un club du côté du Texas... Typiquement le genre de groupe qu’on aurait pas idée d’aller voir en concert, mais qu’on prend toujours plaisir à voir dans le cadre d’un festival.

Par contre, pour le concert suivant, on peut parler d’évènement, car le groupe qui rassemble une foule énorme devant la Grande Scène n’est autre que le Wu-Tang Clan. D’ailleurs, on pouvait se rendre compte de l’importance du truc à la prolifération des panoplies casquettes/survet’ trop large/basket qui n’étaient sans doute pas là pour les Rita Mitsouko. Concrètement, on se rend vite compte que le Wu-Tang est une grosse machine, et malgré le décès de Dirty Ol’ Bastard, ils sont tout de même nombreux à occuper la Grande Scène. Nombreux mais peut-être pas très motivés... Alors heureusement, le professionnalisme est là. Les chansons aussi... Même si l’habitude (voire la lassitude) se fait sentir, le flow et les instrus rappellent pourquoi le Wu-Tang mérite sa place ici. Et ce n’est pas quelques problèmes de son qui permettront d’affirmer le contraire.

Malgré tout l’intérêt que je peux porter aux membres du Wu-Tang (intérêt tout relatif puisque j’avoue que c’était la première fois que j’entendais leur musique), j’ai préféré me rapprocher de la grande scène pour attendre LE concert de la journée que je voulais voir, à savoir Amy Winehouse. Après tout le mini-buzz (à l’époque) dont elle avait fait l’objet, la curiosité poussait à vouloir en savoir plus. Et la première (agréable) surprise, c’est le décor. Installé sur la scène du Chapiteau, un décor façon saloon chic fin XIXe siècle avec lustres et rideaux en velours rouge impose une ambiance chaude et très agréable, même serrés les uns contre les autres sur un sol hésitant entre la terre et la boue. Et lorsqu’arrivent les musiciens, en costard façon roadie des White Stripes, impossible de réprimer un sourire. Décidément, la petite Amy se la joue soul lady jusqu’au bout... Enfin, presque. Parce que la soul lady anorexique en jean taille basse et coiffure digne d’un Frank Lloyd Wright (l’architecte du Guggenheim de New York), ça le fait pas trop. Mais peu importe puisqu’elle montre très rapidement qu’elle peut rendre la même intensité en live que sur disque et pour ce qui me concerne, c’est la seule chose qui m’intéresse. Elle égrène donc les titres de son Back In Black avec une petite reprise du Valerie des Zutons.

Par contre, ce qui choque un peu, c’est son côté introverti. Là où on pouvait attendre une diva sûre d’elle et maîtresse de la scène, Amy bouge peu et paraît presque intimidée par le public, pourtant pas si nombreux que ça (on est pas sur la Grande Scène). Une fois le concert fini, on reste avec une impression un peu mitigée. Un moment très agréable, certes, mais sans plus.

Le temps de se reposer un peu dans l’herbe et de palabrer et mes chères confrères et moi-même décidons d’un commun accord que devoir attendre des heures à rien faire avant de voir Justice n’est pas une perspective très alléchante. Les Rita Mitsouko et Marilyn Manson faisant office de répulsifs, nous nous dirigeons donc vers le public dans l’espoir de se reposer un peu en vue de la journée du lendemain qui s’annonçait beaucoup plus chargée !!!


Eurockéennes Jour 2

La stratégie de repos tentée la veille a échoué pour cause de proximité de la tente Duracell qui passe de la techno à fond jusqu’à 3h du mat’. Mais qu’à cela ne tienne. Nous sommes toujours debout. Et alors que nous arrivons sur le site, un étrange sentiment (encore non identifié à ce jour) nous pousse à aller jeter un coup d’oeil à Joey Starr qui occupe la Grande Scène : l’animal porte un T-Shirt à son effigie et est accompagné par le groupe de néo-metal français Enhancer... dit comme ça, ça peut faire peur. Mais en réalité, c’est pire. Sa voix est tellement rocailleuse qu’elle passe très mal dans la sono. Malgré toute notre bonne volonté, je vous laisse imaginer la réaction de.vos pauvres rédacteurs B-Side face à ce spectacle.

Un petit détour par le chapiteau pour voir le début du set de Cold War Kids. Le public du chapiteau ne semble pas très réceptif à leur pop un tantinet autiste, mais ils n’en ont visiblement cure et enchaînent les chansons au plus grand bonheur des fans présents (en gros les 5 ou 6 premiers rangs). Fort sympathique au demeurant, la musique de Cold War Kids n’est pas suffisante pour nous retenir d’aller voir Blanche dans la Loggia. Bien que jouant face à une audience un peu clairsemée, le groupe semble s’en donner à coeur-joie. Inviter ces protégés de Jack White et leur country-rock

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Blanche, guitare et banjo

(plus country que rock, il suffit de voir leurs tenues western) dans un festival français était audacieux. Respectant les codes country à la lettre avec lap-steel et banjo (tenu par le bassiste des Greenhornes et des Raconteurs), le groupe diffuse une bonne humeur et une folie douce dans la Loggia, à tel point que les spectateurs se lanceront spontanément dans une farandole pour le plus grand amusement du groupe. Et, chose rare, pour un petit groupe en festival, le public demandera même un rappel, que le groupe accordera avec un plaisir non dissimulé.

Et en sortant de la Loggia, on tombe naturellement sur Editors qui accaparent déjà la Grande Scène. On reste devant quelques instants, histoire de découvrir un peu ces "nouveaux Joy Division". Et on est rapidement déçu. Non seulement la musique se résume à de la cold-wave sans grande inventivité. Mais surtout là où on attendait un Ian Curtis habité tout en rage ravalée et soubresauts agressifs, on a... BONO !!! Certes la voix se rapproche un peu du leader de Joy Division, mais au niveau de la gestuelle, on tombe dans le cliché du chanteur tellement habité qu’il se sent obligé d’en faire des tonnes, croisement entre Bono et Dave Gahan, voire un Matthew Bellamy auquel on aurait greffé des testicules pour qu’il puisse chanter dans les graves. Mais malgré la déception, il est facile de comprendre pourquoi Editors ont droit à la Grande Scène. Malgré (à cause ?) de leur côté cold-wave pseudo-tourmenté, c’est un groupe à stade. Et leur chanteur n’échappe au ridicule que grâce aux écrans géants : prenez un mec qui semble se débattre contre du vent et foutez-le devant 500 personnes, il aura l’air pathétique. Mettez-le sur une scène immense et projetez sa gueule sur écrans géants et la plupart des personnes présentes y croiront.

Peu emballés par ces Gutemberg, nous nous retrouvons à flemmarder un peu au stand Coca en lisant des exemplaires de la presse régionale éparpillés là. Et à notre grande amusement, on peut y lire un critique particulièrement féroce du show de Marilyn Manson de la veille. S’il n’arrive même plus à impressionner la presse régionale, c’est qu’il doit y avoir un problème dans le sacerdoce du Révérend. Et pour cause, lors de la conférence de presse bilan, un des programmateurs qualifiera même Manson "d’artiste en fin de cycle qui n’a plus rien à dire". Mais trêve d’amusement. Vient le moment de choisir entre Phoenix et Maximo Park... Un choix pour le moins vite fait puisque l’écho des premières notes des Versaillais nous poussent un peu plus vers la Plage et ces anglais qui entrent en scène au son de l’intro d’Orange Mécanique. Pop-songs efficaces, jeu de scène efficace, Maximo Park est un groupe efficace. Pas de véritable génie, mais plutôt un savoir-faire typiquement anglais. On retient leurs refrain juste le temps nécessaire (c’est-à-dire le temps de les ahaner en choeur) et on passe à la chanson suivante. Tout cela étant fort sympathique, mais sans aucune commune mesure avec la fin de la soirée... Si tôt le concert fini, direction la Grande Scène pour attendre la vague tellurique des Queens Of The Stone Age.

Ponctuels et sans DJ préalable (vivent les festivals, ça change de l’Elysée-Montmartre), la bande à Josh Homme attaque directement le public au corps et ne le lâchera qu’une heure plus tard, après un Song For The Dead, machine à écraser la foule, à piétiner les corps et pilonner les cerveaux. Entre-temps ? Une set-list exceptionnelle... Les tubes Burn The Witch et No One Knows côtoyant des titres plus obscurs comme ce Mexicola tiré du premier album ou Monsters in the Parasol extrait de Rated R. On pourrait peut-être regretter Make It Wit Chu, mais à la réflexion, le public de festival ne se prête pas vraiment à ce genre de chanson. On aura donc droit à Little Sister, Sick Sick Sick et autres Go With The Flow. Rien que du lourd. Et vu la réaction de la foule, l’Homme sait y faire. Son concept de QOTSA évoluant à chaque album, il s’aide désormais d’un clavier-guitariste supplémentaire, ce qui lui permet de laisser planer une ambiance psychédélique via la lap-steel de Troy Van Leeuwen sans pour autant perdre en puissance de frappe.

Et heureusement que les programmateurs ont réservé une petite pause dans les deux têtes d’affiche de la soirée, ce qui permet de souffler un peu en attendant les Hives. Tout en mégalomanie goguenarde, les Suédois débarquent sur la Grande Scène sous un immense The Hives en lettre de lumière. Devant un tel spectacle, deux attitudes possibles. Foncer tête baissée dans la fosse pour pogoter un maximum durant les morceaux ultra-speedés et respirer un grand coup durant les speechs délirants de Howlin’ Pelle Almqvist : déclarations fracassantes ("Normalement, nous sommes excellents... Ce soir, on va être EXCEPTIONNELS !!!"), partage en vrille ("la MOON, elle est FULL... je vais me transformer en loup-garou."). Bien sûr, on peut aussi reculer un peu et assister au spectable, un large sourire au lèvre. Car le tour de force des Hives est de plaire à la fois aux petits énervés des premiers rangs et aux fatigués du fond qui ne peuvent résister à l’humour du groupe mené par un Iggy Pop qui aurait compris le comique du show rock, et jouerait avec. Howlin’ Pelle monte aux échafaudages, descend dans la foule, mais il n’est jamais dupe. Le spectacle se prolonge pendant une heure, c’est peut-être un peu lassant vers la fin, mais on rentre tout de même au camping de très bonne humeur grâce aux Hives.


Eurockéennes Jour 3

En se dirigeant vers le festival, on se demande comment cette journée va pouvoir être à la hauteur de la précédente. Et inutile de faire durer le suspense. Le troisième jour des Eurocks fut beaucoup plus calme, moins intense mais idéale pour boucler le festival. On commence par Stuck In The Sound : les Parisiens entament les hostilités sur la Plage et parviennent à convaincre à la force des bras une audience un peu réticente. Rapidement, le sable vole au son de Toy Boy ou Don’t Go Henry. Puis, vient le tour de Loney, Dear. Adeptes d’une pop calme et sereine, dans la lignée de Grandaddy (le petit grain de folie sonore en moins), le groupe manque cruellement de charisme pour attirer le chaland. Mais pour peu qu’on prenne le temps de se poser sur le sable, et il flotte une ambiance de fin de festival fort à propos.

Difficile ensuite de se plonger dans le free-rock de TV On The Radio. Le set est assez bruyant et bordélique, la balance n’étant pas suffisamment réglée pour supporter le nombre de musiciens présents sur scène. On préférera donc aller attendre The Good, The Bad & The Queen devant la Grande Scène...

Que dire de la prestation de TGTB&TQ ?? Du point de vue des musiciens, il n’y a rien à redire. Le set était bon. La set-list, si elle n’était pas d’une originalité folle, restait efficace. Non, le problème venait de l’endroit et du moment. Faire jouer le groupe sur une scène immense en plein jour, alors que leur musique réclame plutôt un cadre un tant soit peu intimiste était une erreur. Une Loggia ou un Chapiteau aurait été parfait. Mais, sur la Grande Scène, toute l’âme du groupe semblait s’évanouir dans la foule. Dommage...

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Simon Tong et Damon Albarn (The Good, The Bad & The Queen)

En revanche, le groupe qui m’a agréablement surpris fut indéniablement les Klaxons. Occupant la scène du Chapiteau, je craignais que ces nu-ravers, tout auréolés de leur succès instantané, ne soient directement passés à la phase mégalo. Mais il n’en est rien. Les éclairages sont sombres et on distingue à peine les musiciens. La lumière sert d’appui aux rythmes du trio et non à flatter leurs egos. De même, je m’attendais à un set tout en couleur, néo-Madchester. Et au contraire, l’ambiance est oppressante. Ce n’est pas de la nu-rave, mais de la paranoïa-dance. Et ce n’est que grâce à leur talent mélodique que les Klaxons parviennent à faire bouger un public craignant de se retrouver enseveli sous des beats de démolition.

Par contre, pour la suite, nous avons dû scinder notre groupe, jusque là assez soudé, puisque sous nos regards horrifiés, Vyvy déclara vouloir aller voir Tryo sur la Grande scène. Je lui laisse donc la parole pour vous décrire cet épisode.

Tryo... laids

De nous trois, j’étais la seule à avouer un penchant, ancien, bien enraciné, pour le reggae-français du trio quadrilatère, et, pendant que mes comparses et estimés collègues se relaxent (et nous assuraient de bonnes places pour Air), voilà que je me fraye un chemin, bon an mal an, vers la Grande Scène. Tryo a ce soir rameuté beaucoup, beaucoup de monde, mais il faut avouer que les autres scènes sont assez vides à cette heure précise, et donc, le choix des festivaliers était bien maigre. Maigre est aussi la set list des français. Amatrice de Tryo, j’étais, je suis encore, assez critique, et nombreuses étaient les chansons du répertoire que je n’appréciais pas, mais alors pas du tout. Car si Tryo est assez doué pour décrire le vague à l’âme, le mal être, la souffrance, dès qu’ils se mettent à la politique, on navigue de clichés en clichés (cf. le gazé au nom du bon texan de Dans Les Nuages). Et cette tendance ne semble pas prête à infléchir, car la nouvelle chanson présentée dans la première partie du set, pleine de bons sentiments, de rares bons mots, et (soyons franc, surtout) de ridicule nous prend encore pour des cons, pendant que d’un ton pédant, Tryo vilipende la manière dont l’homme n’a rien à foutre de son concitoyen-confrère. Soit... Le sujet, à savoir l’hypocrisie des prises de consciences soudaines (style tsunami) mérite peut être d’être traité, mais s’il vous plaît ! Un peu de retenue dans la guimauve rebelle !! Le fait est que les chansons les plus "festives" de Tryo sont de ce genre militant-inet lourd, et que les chansons douces, "subtiles" ne se prêtent pas à une Grande Scène belfortienne. Dommage. Tant pis pour Tryo, je m’éclipse avant la fin, Air lui ne me décevra pas.

Laissant donc Vyvy avec ses... euh... les... hum... je ne trouve pas de mots pour les décrire, mais peu importe. Laissant Vyvy vaquer à ses occupations, nous déambulons, Béatrice et moi, jusqu’à la Loggia pour un petit extrait du set de Laurent Garnier. Le public est certes moins nombreux que devant Tryo, mais il est récompensé d’avoir résisté aux sirènes de la démagogie THCisée. Aidé d’un guitariste et d’un trompettiste, et bien sûr des projections ad hoc, le Français démontre par l’exemple pourquoi il reste toujours considéré comme un des plus grands DJs mondiaux. Bien que votre serviteur ne puisse se vanter d’une culture techno digne de ce nom, impossible de ne pas apprécier l’immédiateté de cette musique, pourtant plus complexe qu’il n’y paraît.

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Nicolas Godin (Air)

Et puis, vient Air. Tout de blanc vêtus, musiciens en noir, tout comme à la Cigale. D’ailleurs, la set-list sera sensiblement identique. Entrée au son de Radian, peu de morceaux de Pocket Symphony, mais un retour sur les anciens titres de Moon Safari avec un Kelly Watch The Stars envoûtant, un Sexy Boy toujours aussi efficace et une version lounge de La femme d’argent évoluant vers un climax hypnotique. Malheureusement, c’était prévisible, Charlotte Gainsbourg et Neil Hannon n’avait pas fait le déplacement. Mais le show de Air n’en est pas moins excellent. Le duo a pris de l’assurance vis-à-vis des musiciens qui l’accompagnent et est visiblement plus détendu. Le résultant n’en est que meilleur et peu de personnes dans la fosse semblent rester insensibles à l’ambiance dégagée par le groupe. Oscillant entre rock, lounge et electro, on oublie qu’on est sous une immense tente ouverte aux quatre vents et on se retrouve dans un endroit hors du temps où couleurs et musique se confondent. Air ou la synesthésie totale, les pieds dans la boue.

Vient ensuite le final du festival, Arcade Fire venus en point d’orgue des Eurockéennes. Et je laisse la place à Béatrice, fan attitrée du groupe parmi la délégation B-Sidienne aux Eurocks.

Arcade Fire on zeurocks

C’est au combo montréalais que revient la tâche et l’honneur de conclure le festival, tâche rendue autrement plus ardue, on s’en doute, par le fait que le dernier groupe à avoir investi la Grande Scène a été Tryo. Un sale tour du programme, ce vicieux qui n’allait quand même pas nous laisser nous amuser sans broncher, a voulu que ce dernier effort de la Grande Scène débute alors même que Air était encore en train d’achever doucement son set, ce qui aura permis, au moins, un de ces petits dilemmes cornéliens sans lesquels un festival n’est pas vraiment un festival : savourer Air jusqu’à la lie, ou profiter d’Arcade Fire à une bonne place, that is the question... Une avantageuse pluralité des B-Siders présents sur le terrain aura heureusement permis que les deux alternatives soient tentées, et donc traitées ci-après (ou ci-avant, pour la première, mais, si vous avez suivi, vous n’avez normalement pas besoin de ce rappel).

La Grande Scène s’est donc transformée en fatras d’instruments, d’écrans discoïdes montés sur piloti, et de néons en formes de bibles (et non le contraire), toute prête à accueillir les Canadiens, qui, cette fois, auront du mal, on l’imagine, à commencer leur set en acoustique au milieu du public comme ils s’étaient amusés à le faire à l’Olympia. Et en effet, c’est bien sur la scène qu’ils entament Keep The Car Running, toujours aussi efficaces, toujours aussi captivants, et toujours aussi appréciés. Les nuages, qui jusque là s’étaient retenus, privant le festival de ses traditionnelles averses, en versent même une larme, puis deux, puis trois, et fondent littéralement en sanglots quelque part entre Intervention et Ocean Of Noise. Il en faut plus pour perturber les musiciens, apparemment ravis, surtout qu’eux sont à l’abri... Le public non plus, semble-t-il, ne trouve pas la pluie trop embarrassante (il faut remarquer que la musique d’Arcade Fire s’y prête particulièrement bien), et c’est devant une foule aussi extatique que trempée (et qui aime beaucoup hurler "Liiiiies Liiiiies" en agitant les bras en l’air) que l’armée de missionnaires à guitares-accordéon-cymbale-casque à moto se paye le luxe d’un joli rappel, avant de sourire, remercier, sourire, remercier, et s’en aller... Et si cela rester à prouver, il est désormais indéniable qu’Arcade Fire en concert, sans être forcément le groupe le plus transcendant, époustouflant, tétanisant qu’il soit donné de voir et écouter, est en tout cas un euphorisant extrêmement puissant, capable de secouer les tympans et d’étirer les zygomatiques même sous la pluie, et même au bout de 72h de festival.

Bilan

Au final, ces Eurockéennes ont été un excellent cru. Pas de grosse tête d’affiche (mis à part Manson qui a, visiblement déçu beaucoup de monde), mais une programmation variée et contenant son lot de surprises (Blanche, Klaxons, etc...). Mais le grand mérite de cette année, et la grande satisfaction des programmateurs à la conf’ de presse bilan, c’est d’avoir réussi une programmation homogène et assez attractives pour retenir le public trois jours durant. Et effectivement, mis à part quelques "gothiques" venus pour Marilyn Manson et dont on ne trouvera plus trace passé la première nuit, on retrouve sensiblement la même affluence chaque fois, avec un camping qui ne se désemplie pas. Et une fois passées les grosses têtes d’affiche décevantes (Wu-Tang Clan et Manson) et expédiées le premier jour, les Eurockéennes auront assuré une excellente programmation (Amy Winehouse, Blanche, QOTSA, Laurent Garnier ou Arcade Fire). On attend donc l’année prochaine qui sera la 20e année des Eurocks et bien que les programmateurs prétendent que c’est le cadet de leurs soucis, on espère bien un petit quelque chose par rapport à cette édition déjà excellente !!!

Simon Tong et Damon Albarn (The Good, The Bad & The Queen)


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