Sur nos étagères
Novelty

Novelty

Jawbox

par Parano le 2 octobre 2007

4

paru en mai 1992 (Dischord)

Diminuer la taille du texte Augmenter la taille du texte Imprimer l'article Envoyer l'article par mail

Si un album mérite de figurer sur B-Side Rock, c’est bien celui-ci. Parmi la cohorte de rock bands talentueux, tombés en rade sur l’autoroute de la gloire, Jawbox a de quoi chialer sur le capot du van. Groupe culte pour quiconque s’intéresse un peu à la musique alternative, le quatuor a incarné l’avenir du post hardcore américain, avant de câler en pleine côte. Radical, abrasif, catchy, mais toujours mélodique, le rock de jawbox a montré la voie à suivre à un tas de gamins boutonneux. Et jawbox est devenu une référence, pire, une caution, au lieu d’être un grand groupe. Il suffit d’écouter Novelty pour s’en convaincre. La production est naze, label Dischord oblige, mais l’album, enregistré en 1992, après un premier LP en 1991 (Grippe), est d’une pertinence à faire pâlir Brian Molko (si, c’est possible). J. Robbins, ancien bassiste de Government Issue, passé à la 6 cordes, aime écrire des chansons faussement modestes, du genre qui collent aux semelles des converses, et les enterrer sous un déluge de guitares. Mais attention, Jawbox ne se contente pas d’éclater vos tympans avec trois accords et des poses de singes speedés au jus de banane. Non, ici la richesse harmonique nous expédie directement chez Sonic Youth, et l’entrelacs savant des riffs nous laisse la bave aux lèvres (ou la mèche de travers pour les plus distingués de nos lecteurs). La délicieuse bassiste Kim… Deal ?... Gordon ?....non, Coletta (je vous épargne Kim Wilde et Kim Jong-Il) tient la baraque avec poigne. Son attaque nerveuse, le son rauque de sa précision bass, jouent des coudes avec la batterie implacable d’Adam Wade. Aucun doute, la charpente est solide. Pas un bout de gras pour alourdir la dynamique du groupe. Il suffit de se laisser porter en pleine lumière par les harmonies cristallines, et de sautiller nerveusement dans la rame de métro bondée, avec son ipod, en lançant des regards amoureux à tout ce qui marche sur deux pattes.

L’album s’ouvre sur Cutoff, une bonne bûche hardcore assez classique, capable de rassurer les fans de Fugazi. L’ambiance monte vite d’un cran avec Tracking, qui cogne comme du Helmet, et la pop hargneuse de Dreamless, en guise de rampe de lancement. Après un Channel 3 un peu chancelant, dont la principale qualité est de mettre en valeur le reste, Jawbox ne lâche plus un pouce de terrain. Spiral Fix, Linkwork et Static, titillent le meilleur du rock indé US (Dinosaur Jr, Sonic Youth, Fugazi, encore). Le tubesque Chump mord à belles dents dans la cuisse grasse du punk mélodique et Sent Down recrache les os du hardcore des 80’s, depuis longtemps digéré. La richesse de Jawbox, c’est aussi de savoir tirer du puit quelques grenouilles new wave, et d’en faire de farouches princes post punk (Spit-Bite et Tongues, avec son intro de guitare à la Johnny Marr). On passera vite sur le dispensable Ones & Zeros, qui clot l’album, comme pour mieux dire « on a tout donné ». L’affaire est dans le sac.

Novelty est l’album qui a propulsé Jawbox sur l’avant scène, mais Dischord n’est pas Sub Pop, et le disque, mal distribué, s’est mal vendu. Le groupe, légitimement déçu de ne pouvoir payer ses factures avec un album aussi costaud, est passé discrètement chez Atlantic, une major. Trop tard. Le petit prince du grunge s’est fait sauter la cervelle, et le vent a tourné. Le public s’éclate dorénavant sur Coolio, Boyz II Men, et le rock indé est entré en léthargie. Désservis par un look complétement ringard (pas de rimel, pas de cheveux en pétard, seuls les Pixies et Pavement ont fait pire), Jawbox a peu à peu perdu son public. Deux albums sont néanmoins sortis chez Atlantic (For Your Own Special Sweetheart en 1994 et Jawbox en 1996), avec un relatif succés (quelques clips sur MTV). En 1997, Zach Barocas lâche ses baguettes pour reprendre ses études à New York. Le groupe splitte aussitôt, dans l’indifférence quasi générale. J. Robbins se console avec Burning Airlines, qui disparaitra quelques années plus tard. Une page de l’histoire se tourne, et, tandis que les kids font un pont d’or à Fall Out Boy et Good Charlotte, les autres se consolent avec Novelty.



Répondre à cet article

modération a priori

Attention, votre message n'apparaîtra qu'après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom



Tracklisting :
 
1. Cutoff (3’50")
2. Tracking (2’32")
3. Dreamless (4’08")
4. Channel 3 (2’55")
5. Spiral Fix (4’51")
6. Linkwork (3’56")
7. Chump (2’26")
8. Static (4’06")
9. Spit-Bite (4’51")
10. Send Down (2’42")
11. Tongues (4’03")
12. Ones & Zeros (3’02")
 
Durée totale : 43’30"