Incontournables
Relationship Of Command

Relationship Of Command

At The Drive-In

par Parano le 12 mai 2009

Paru le 12 septembre 2000 (Grand Royal)

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Certains groupes s’épuisent après des débuts fracassants. Un ou deux albums lumineux, et puis plus rien. Le talent qui s’étiole, l’inspiration qui fuit. Une lente agonie, avant l’indifférence. D’autres se bonifient avec l’âge. Apprennent. Grandissent. Explosent et disparaissent en laissant regrets, sang et larmes. At The Drive-In fait assurément partie de ceux là. A l’automne 2000, juste après la fin du monde, le bug planétaire, et quelques mois avant le retour en grâce du rock à guitare, le quintette d’El Paso, Texas, a enfanté un chef d’œuvre. Pour mieux disparaître.

Tout s’est joué en quelques semaines. Incrédulité d’abord. D’où sortent ces types ? C’est quoi cette dégaine de MC5, ces converses trouées, ces tee-shirt poussiéreux, ces guitares fracassées ? Anachronisme ou coup marketing ? L’époque est au néo métal pleurnichard. Au techno rock sautillant. Le grunge fait rire les enfants. Le punk s’incarne désormais chez les clowns de Blink 182 et Sum 41. Enthousiasme ensuite. Putain ce que c’est bon ! Retour aux sources. L’underground resurgit à la face du rock, pour botter le train des marchands de révolte. Il a suffit d’un disque. Le dernier du groupe. Après sept ans de carrière sur la planète indé, trois albums et des tonnes de rage déversée on stage, At The Drive-In se prend le succès en pleine poire. Il est trop tard. Le groupe est épuisé. Relationship Of Command, c’est le chant du cygne. Un dernier coup de rein avant le coma prolongé. La mort.

On a placé tellement d’espoir dans ce groupe, entre septembre 2000 et février 2001. Les pouilleux du rock indé qui débarquent sur une major, confient le son à Andy Wallace, et balaient tout sur leur passage, ça ne vous rappelle rien ? L’espace de quelques semaines, on a pu croire à un nouveau Nirvana, un autre Rage Against The Machine. Le coup du messie, on connaît pourtant. C’est toujours un leurre. Quoi qu’il en soit, Relationship Of Command s’est métamorphosé en relique sacrée, cinq mois seulement après sa sortie. Un titre usurpé ? Avec le recul, neuf ans déjà, on peut affirmer le contraire. Les douze titres de l’album n’ont rien perdu de leur éclat. Entre fureur et écriture. Soubresaut punk et travail de conscience. Le napalm flambe à jamais sur Arcarsenal, Pattern Against User, Sleepwalk Capsules, Cosmonaut, et One Armed Scissor, le single calciné en rotation sur MTV. Guitares au corps à corps, ossature brisée, voix arrachées. On pense à Fugazi, Drive Like Jehu, toute la scène post hardcore du début des 80’s.

Mais ATDI n’a pas que la rage à faire valoir. Le groupe brille là où on l’attend moins. Dans la quête d’une émotion. Sur la trace des Smiths, par exemple, dont ATDI a repris This Night Has Opened My Eyes. Ou du Floyd, période Syd Barrett. La tentation est là. L’envie de s’affranchir, toujours plus, des limites du hardcore. Sur Invalid Litter Dept, Non Zero Possibility, At The Drive-In se pose, respire, cherche. Les machines s’invitent. Laissant présager d’autres textures, d’autres espaces sonores à explorer. Cette dualité conduira le groupe à l’implosion. Cédric Bixler et Omar Rodriguez d’un côté (The Mars Volta). Jim Ward, Paul Hinojos et Tony Hajjar de l’autre (Sparta). Divergences musicales. Drogues. Lassitude. At The Drive-In jette l’éponge en février 2001.

Reste cet album. Relationship Of Command. Enregistré à Malibu par le pape du nu métal et du label Roadrunner, le délicieux Ross Robinson. Un vrai choc des cultures. ATDI a hésité à faire appel à lui. Mais Robinson a su convaincre son monde. Il parvient à retranscrire l’incroyable énergie qui transpire des prestations live. Voilà des années qu’At The Drive-In se casse les dents en studio. La violence leur échappe. Mais Robinson a sculpté les albums des Deftones, de Korn, ou Sepultura. Il donne au quintette la puissance qui lui manquait, sans travestir sa musique. Conscient que cet album est le bon, ATDI se paye le luxe d’un invité prestigieux. Iggy Pop pose sa voix sur le sulfureux Rolodex Propaganda. Entre son bodybuildé et éthique, les texans n’ont pas choisi. L’histoire leur donnera raison. En 2001, le public a retrouvé le goût du rock. La déferlante des groupes en The commence au moment où ATDI s’effondre.



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Tracklisting :
 
1. Arcarsenal (5’55")
2. Pattern Against User (3’17")
3. One Armed Scissor (4’19")
4. Sleepwalk Capsules (3’27")
5. Invalid Litter Dept (6’05")
6. Mannequin Republic (3’02")
7. Enfilade (5’01")
8. Rolodex Propaganda (2’55")
9. Quarantined (5’24")
10. Cosmonaut (3’23")
11. Non-Zero Possibility (5’36")
 
Durée totale : 45’31"