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mercredi 15 avril 2015
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par Fino le 11 septembre 2006
paru en janvier 1967 (Elektra).
Quand Jim Morrison, sex-symbol étudiant en art, et Ray Manzarek, son camarade de UCLA, clavier aux influences blues, décident d’explorer le côté sombre du rock’n’roll mis sur orbite par les Beatles, The Doors écrirent par des prestations mystiques et scandaleuses une page dans le tournant des années 1960.
Après avoir décroché une contrat chez Elektra, la sensation houleuse du Whisky A Go-Go - club branché de la Cité des Anges - enregistre en une semaine ce qui est certainement un des meilleurs premiers albums de l’histoire du genre. Dans cette palette bluesy, le groupe va tenter de plonger dans vers des aspects plus obscurs que la déferlante Summer Of Love. La section mélodique Ray Manzarek - Rob Krieger fait des merveilles, à l’image de l’introduction culte du formidable Break On Through, ouverture de l’objet. Morrison hurle son vif intérêt pour la prise de stupéfiants (« Break on through to the other side »), ô rage divine.
Manzarek joue des simplicités d’une efficacité rare (Soul Kitchen, I Looked At You), le sombre leader s’hypnotisant sur des textes obscurs étrangement poussés et ambigus pour l’époque (Back Door Man, End Of The Night). John Densmore, impeccable à la batterie, martèle des rythmes implacables issus des rythmiques jazz. Au milieu de cette douce descente aux enfers, de purs bijoux traversent un album particulièrement dense. Light My Fire, interminable jouissance au clavier démoniaque, place le quatuor en pleine stratosphère. Le morceau, que la maison de disque avait honteusement amputé pour qu’il corresponde au format radio, fut très rapidement réclamé dans son intégralité - solo démentiel de Manzarek inclus - par les auditeurs, qui parvinrent rapidement à imposer leur volonté.
Le groupe démontre une efficacité mélodique imparable pour réaliser des chansons dans la plus pure tradition rock. Des pistes telles que I Looked At You ou Take It As It Come ont le surprenant pouvoir de pouvoir forcer l’auditeur à les mettre en boucle pendant un temps interminable. La construction est classique mais efficace. Morrison égrène les textes recherchés et les refrains entraînants, avant de s’énerver après un pont de toute beauté.
C’est ici qu’arrive le passage obligé dans une chronique de premier Doors, tant toute cette obscurité est magnifiée en un peu plus de onze minutes. The End, puisqu’il faut bien la nommer. Ou comment le malaise né de l’excellent Alabama Song (Whiskey Bar), se trouve propulsé en plein complexe d’Œdipe. LA chanson qui fait que l’on reste scotché à son écran toute la durée du générique de fin d’Apocalypse Now. Morrison l’alcoolique notoire, alors sous forte emprise psychotrope, ouvre au rock’n’roll la porte de textes complexes et terriblement noirs. A l’époque, cet assourdissant « Father I want to kill you / Mother I want to fuck you all night », bien évidemment immédiatement censuré, provoque une déflagration inédite.
OUI, cet album est un chef-d’œuvre, OUI, The Doors était un grand groupe. OUI, Lou Reed a fait beaucoup mieux dans le malsain, mais du royaume des ténèbres, le somptueux Jim Morrison en devenait un prince magnétiquement attirant.
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