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The Rolling Stones Songbook

The Rolling Stones Songbook

The Andrew Oldham Orchestra

par Our Kid le 20 février 2006

4

paru en juin 1966 (Decca) ; réédité en 2004 (Decca/Universal)

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Le fameux André Vieux Jambon ! L’homme à (presque) tout faire des Stones, le symbole du manager branché des années 1960 : aussi vieux que ses protégés à cheveux longs, hyper-actif, débordant d’idées et visiteur régulier des boîtes à la mode du Swinging London. Le type qu’on associe d’emblée à la carrière des Graviers, à l’instar d’un Brian Epstein pour les Beatles, celui qui fait la une des magazines pour adolescent(e)s. Oui, oui, Oldham est bel et bien un personnage important de l’industrie musicale des 50 dernières années, un gars qui a fait bouger pas mal de choses dans le milieu.

Mais le père Andrew, c’est aussi et surtout un gars qui se serait bien vu musicien mais qui ne sait même pas jouer du triangle. Toutefois, avec la machine de guerre qu’il a créée avec ses Rolling Stones, notre manager se croit permis de concrétiser son rêve de diriger un orchestre et de voir son nom sur les disques autrement que sous le titre de manager. On l’a d’ailleurs connu producteur de certains disques de ses protégés - il se partage même les crédits sur As Tears Go By - mais depuis que ses Silex déboulent sur le monde occidental, Oldham sort en parallèle depuis octobre 1964 des disques avec un orchestre à lui, le Andrew Oldham Orchestra, ce qui lui permet de graver sa propre musique, un « style de vieil orchestre ajouté à une musique considérée comme moderne, provocante ». À l’origine de simples blagues (16 Hip Hits), les disques de l’ensemble se veulent de plus en plus sérieux avec le temps (Lionel Bart’s Maggie May puis East Meets West - A Tribute To The Beach Boys And The Four Seasons) et notre golden boy décide de s’attaquer carrément au répertoire de ses poulains dans son quatrième et dernier disque. Il pousse même le vice jusqu’à faire paraître le disque en même temps que les singles Paint It Black et Paperback Writer des Scarabées ! Bien sûr, le son du sitar et du psychédélisme à venir l’emportent sur les cordes et les arrangements orchestrés des musiciens d’Oldham, mais il s’en fout le père Andrew.

L’album s’ouvre avec Blue Turns To Grey, sorti un an plus tôt par les Stones. La guitare est remplacée par des cordes et la voix de Jagger par un saxo et une section vocale féminine chante le refrain derrière le torrent sonore. Oui, Phil Spector n’est pas très loin. À la suite, on a le droit à un Satisfaction à l’intro encore plus sauvage que l’originale ! Des musiciens « pop » sont conviés sur ce morceau (John Paul Jones, Nicky Hopkins, Andy White et John McLaughlin) et le son de guitare est graveleux, la batterie est particulièrement enjouée et a des choses à dire. Le mélange orchestre/son crade est exquis et la chorale qui chantonne « Satisfaction » est un délice. Le tempo se ralentit pour You Better Move On, interprété façon « le morceau est joué par des trompettistes mexicains » et on est réellement en face d’une musique de film. Cependant, dès les premières notes, on reconnaît le morceau des Stones. À ce jeu-là, la version de Time Is On My Side brouille les pistes. Alors que l’originale s’apparente à une complainte un peu sombre musicalement, The Andrew Oldham Orchestra en fait un morceau enjoué, dansant sur lequel il est plus qu’aisé de séduire son/sa partenaire. Une belle réussite. L’orchestration de Heart Of Stone se veut plus faiblarde en comparaison de ce qu’on a connu et l’ambiance du single est préservé voire poursuivie sur ce disque. On a cependant le droit à un bon coup de voix féminines pour contrebalancer cette ambiance peu réjouissante. À la suite, on retrouve Oldham avec son bébé : As Tears Go By. Les hautbois et les piccoli sont de sortie pour en faire une version charmante, presque naïve mais qui colle bien avec le thème de la chanson. Non content de reprendre le répertoire des Silex, Oldham y va même de sa composition avec Theme For A Rolling Stone, sans comparaison aucune, cependant, avec un morceau du duo Jagger/Richards. On y perçoit plus l’influence de la surf music et des productions de Jack Nitszche. Même une face B comme Congratulations ne fait pas tâche dans le décor, signe que l’orchestre sait procurer une autre dimension aux morceaux moyens.

Pour clore en beauté l’album, le manager et son orchestre s’attaque au Bitter Sweet Symphony de The Verve. Euh non ! Je voulais dire The Last Time des Rolling Stones. Bon, on ne va pas tourner autour du pot longtemps, l’intro qu’a utilisée le groupe de Wigan n’est ni plus ni moins que l’intro de ce morceau. On bricole des paroles et des overdubs et ça nous fait un gros tube en 1997. En fait l’utilisation de cette intro n’est pas si bête : c’est le morceau des Stones le moins reconnaissable sur The Rolling Stones Songbook. Le motif de base à la guitare et qui constitue un riff tout au long du morceau original est remplacé ici par des cordes qui semblent lointaines et qui progressivement se rapprochent pour finalement dominer le morceau de bout en bout. Littéralement captivant et destiné à rester au plus profond des mémoires. Difficile en effet de deviner une quelconque parenté avec le morceau des Stones, preuve que le père Oldham avait plus d’un tour dans son sac. En tous cas, rien que pour ce morceau, l’écoute de ce disque est indispensable et il serait bien de l’utiliser lors des allocutions télévisées du Président de la République : son caractère glorieux et son côté victorieux auraient plus d’allure que le Te Deum que l’on traîne comme un boulet depuis trop d’années déjà. Ce serait aussi sympa pour des messageries d’attentes téléphoniques...

De nos jours « exilé » en Colombie, Oldham peut se targuer d’être, aux côtés de James Brown, Isaac Hayes et Barry White, le type le plus samplé de la musique moderne, signe qu’il était peut-être plus doué que l’on pourrait le croire.



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Tracklisting :
 
1- Blue Turns To Grey (2’53”)
2- Satisfaction (2’53”)
3- You Better Move On (3’07”)
4- Time Is On My Side (3’14”)
5- Heart Of Stone (3’02”)
6- As Tears Go By (2’29”)
7- Play With Fire (2’19”)
8- Theme For A Rolling Stone (3’11”)
9- Tell Me (3’58”)
10- Congratulations (2’58”)
11- The Last Time (3’47”)
 
Durée totale : 34’40”