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Le feu sacré

Le feu sacré

par Brice Tollemer le 22 février 2011

En 1991, Nirvana sortait Nevermind. Vingt ans plus tard, Arcade Fire triomphe avec son disque The Suburbs aux Grammy Awards en remportant le trophée de meilleur album de l’année, toutes catégories confondues. Durant cette période, on a tour à tour glorifié la renaissance du rock, sa mort, son retour, sa rechute puis de nouveau son règne. Etat des lieux. Non-exhaustif.

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13 février 2011. Sur la scène du Staples Center de Los Angeles, le groupe canadien remercie (en français dans le texte) « Montréal et le Québec » suite à la remise de son prix. Une victoire surprise face à des mastodontes médiatiques que sont notamment Lady Gaga et Justin Bieber. Dans l’assistance, les « never heard of them » parcourent les travées où sont rassemblés les journalistes, critiques, observateurs et artistes présents à cette cérémonie. Un groupe de rock indé est ainsi récompensé dans une catégorie où avant lui Outkast, Norah Jones ou bien encore Céline Dion avaient fait de même. Comment alors interpréter ce succès ? Le rock a-t-il de nouveau repris le pouvoir ?

Déjà, avant de sombrer dans une analyse boursouflée digne des plus grands éditorialistes de la question, il convient de relativiser ce petit évènement. Les Grammy sont parfois l’occasion de choix dits surprenants : en 2009, Robert Plant & Alison Krauss s’imposent devant Coldplay ou Radiohead et en 2007, ce sont les Dixie Chicks qui sont récompensées… Quant à Arcade Fire, une part non-négligeable d’auditeurs qui avaient apprécié leur premier album Funeral ont décroché à partir de Neon Bible et n’ont que très peu écouté The Suburbs. Mais tout de même. On aime les symboles et ce Grammy en est un après tout. Alors plongeons. Oui c’est rafraichissant de constater qu’un des groupes les plus créatifs de ces dernières années mette la misère à une mauvaise trainée qui se prend pour Madonna et à une huitre pré pubère. Au final, l’année 2011 commence bien pour le rock.

D’autant plus que survient à peine une semaine après la sortie d’un nouvel album de Radiohead. Bon, là encore, on peut mesurer notre enthousiasme : dans ce cas également, bon nombre de personnes qui ont aimé des productions comme The Bends et Ok Computer n’en ont véritablement plus rien à carrer des délires post-electro mes fesses du groupe anglais. D’aucuns diront par ailleurs que la formation d’Oxford serait devenu musicalement ennuyeuse. Peut-être finalement, mais on pardonne (presque) tout à ceux qui ont composé Paranoid Android. Quoi qu’il en soit, malgré leurs succès respectifs, Radiohead, comme Arcade Fire, ont su garder leur intégrité artistique intacte, en ne cédant ni à la facilité (on pense aux Red Hot Chili Peppers), ni à la mégalomanie (on pense à Muse), ni à l’Irlande (on pense à U2). Certes, l’emballement médiatique autour de The Kings Of Limbs est puant de hype dégoulinante (comme NonooStar le décrit très bien ici) mais cette nouvelle façon de sortir des albums n’en est pas moins originale, novatrice et intéressante.

En vingt ans, l’industrie musicale a connu - contre sa volonté – une évolution radicale et des métamorphoses parfois brutales. Quand surgit en 1991 ce tourbillon alternatif, le compact disc et MTV règnent en maîtres. Les chiffres des ventes atteignent des sommets kerveliens et le clip est la martingale promotionnelle de la carrière d’un groupe. D’une certaine façon, s’il a été établi par une datation au carbone 14 que le grunge est le dernier phénomène rock de grande ampleur (en tant que scène ou mouvement), il a aussi bénéficié de circonstances structurelles et conjoncturelles extrêmement favorables quant à sa monumentale diffusion planétaire. Et il avait Dave Grohl de son côté. Qui est encore et toujours actif. On n’a de cesse sur Inside-Rock de vous vanter les mérites de l’ancien batteur de Nirvana. On a raison. Surtout quand on écoute White Limo, le premier extrait du prochain album des Foo Fighters, Wasting Light qui sortira au printemps, produit par Butch Vig et enregistré dans le garage de Dave Grohl.

Le rock revivait en 1991, décédait de nouveau en 1994 avant de renaître en 2001. C’est en tout cas la théorie darwinesque la plus communément admise (rappelons à toutes fins utiles que le rock est originellement mort quand Elvis partit à l’armée en 1958, puis une seconde fois en 1973 que les Stones servirent Goats Head Soup). En ce début de 21ème siècle, on se trouve en pleine période dite « des groupes en the » ou également appelée « retour du rock à guitares » (sic). On a les White Stripes. On a les Hives. Et on a les Strokes avec Is This It. Dix ans plus tard, les Stripes n’existent plus tandis que les New-Yorkais nous livrent prochainement leur Chinese Democracy. Bon, cela risque de ne pas être fameux, vu l’ambiance et la bouse immonde qu’était l’album solo de Casablancas, mais un printemps qui voit germer un nouveau Radiohead, un nouveau Strokes et un nouveau Foo Fighters peut être considéré comme enthousiasmant. Ah, on me fait signe que c’est également cette année que sortira Twenty, le documentaire de Cameron Crowe consacré aux vingt ans de carrière de Pearl Jam...



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