Nouveautés
Monsters & Silly Songs

Monsters & Silly Songs

Joakim

par Yuri-G le 27 mars 2007

3

paru le 16 janvier 2007 (Versatile / Nocturne)

Diminuer la taille du texte Augmenter la taille du texte Imprimer l'article Envoyer l'article par mail

Joakim, les années 80, il doit plutôt bien les connaître. Limite à fond, même. Qui n’y songerait pas, évidemment, à l’écoute de Monsters & Silly Songs ? C’est une déclaration d’amour à leur encontre. Enfin, il n’y a pas qu’elles. On sent que l’album est celui d’un passionné, obsessionnel. Mais heureusement pas exclusif. Il y a donc le krautrock, la pop synthétique, le post-punk, les guitares bruitistes et désordonnées. Les rythmes bien placés et précis, qui font nécessairement taper du pied. Et puis l’electro, car le disque l’est avant tout. Seulement, Joakim a réparti les tâches. Soutenu par l’Ectoplasmic Band, il décide d’assurer une texture organique à ses chansons, mais sans bâillonner ses machines tentaculaires (les Monsters du titre en fait). Guitare, basse, batterie, piano prennent le pouvoir. Et il y a autant à danser négligemment, qu’à se sentir oppressé.

D’ores et déjà, l’album a sa petite légende. Genèse douloureuse, puisque Joakim aurait perdu les enregistrements juste avant le mixage, effacés de son disque dur suite à un bug général. Et tout repris à zéro. Pas fataliste, il décidera de donner à l’ensemble une nouvelle impulsion. On le suppose. Parvenant à concilier des rythmiques soutenues et implacables avec des friches plus désolées et menaçantes. Sleep In Hollow Tree, entrée en matière irrépressible, construit une montée en puissance dévastatrice : une batterie monolithique, soulignée par des synthés grondants et désincarnés, aboutit à une ouverture évidente, des fantasmes nocturnes bleutés, comme dans les meilleurs films de Carpenter (un motif de synthé concis mais puissamment expressif), pressentent un danger imminent, finalement noyé dans des grésillements envahissants. Totalement happé. Pour autant, Joakim ne renonce jamais à la tentation de l’insouciance dance-rock. Immédiatement après, I Wish You Were Gone et son electro fourmillante, ses guitares laconiques, captant la puissance de l’instant, assenées comme chez New Order, relâche l’étreinte, laisse affluer une palpitation hédoniste, mais encore désenchantée.

De toute façon, Joakim ne veut pas trancher entre l’immédiat fédérateur et la transe plus sinueuse, entre Monsters & Silly Songs. Oui, c’est bien cela, un patchwork qui s’assume (les quatres vignettes d’electro abstraite, Monsters lugubres, crépitants et clapotants qui parsèment le disque), avec autant de talent sur la longueur, même si la cohésion lui fait finalement défaut. Rageant, se retrouver face à un assemblage de chansons admirablement travaillées, mais sans véritable lien entre elles. L’accumulation des influences, à l’horizon si étendu et que Joakim développe et parfait jusqu’au bout. Mais cela ne reste qu’une somme de titres.

Ceci dit, se focaliser sur cette relative imperfection serait une belle injustice, tant l’album est efficace. Joakim fait partie de la même famille que LCD Soundsystem, nécessairement. Capacité de synthétiser, capacité de l’évidence - Rocket Pearl, punk-funk débridé et irrésistible, qui débute pourtant par un filet mélodique dévasté et presque sordide. Mais garde pour lui la capacité à s’enfoncer dans des méandres atmosphériques glaçants, sans se poser plus de questions - Everything Bright And Still est une incantation krautrock pétrifiante, Palo Alto une comptine nocturne qui paraît s’enfoncer lentement dans des eaux noires et insondables. L’air de rien, Joakim témoigne d’un brio bluffant sur chaques parcelles qu’il foule. Quant à décider de ne pas transiger entre des morceaux noise aux stridences épiques (Love-Me-2) et des perles pop synthétique au charme nerveusement évocateur (Lonely Hearts), surtout si l’on maîtrise son sujet dans les deux cas, c’est bien ; ces monstres protéiformes sont attirants.



Répondre à cet article

modération a priori

Attention, votre message n'apparaîtra qu'après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom



Tracklisting :
 
1. Monster # 1 (0’20")
2. Sleep In Hollow Tree (4’13")
3. I Wish You Were Gone (3’55")
4. Three-Legged Lantern (7’18")
5. Monster # 2 (0’32")
6. Lonely Hearts (4’34")
7. Peter Pan Over The Bronx (3’01")
8. Rocket Pearl (4’58")
9. Drumtrax (6’07")
10. Everything Bright And Still (4’47")
11. Monster # 3 (0’16")
12. Palo Alto (2’54")
13. The Devil With No Tail (5’14")
14. Monster # 4 (0’42")
15. Love-Me-2 (8’45")
16. Tanabata (6’30")
 
Durée totale : 64’16"