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Philippe Manœuvre

Philippe Manœuvre

par Arnold, Milner le 17 janvier 2006

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Inside Rock : Bonjour Philippe Manœuvre et bonne année ! En l’an 2000, vous posiez la fameuse question "qu’est-ce que c’est qu’être rock en l’an 2000"... Donc, on voudrait savoir, pour vous ce que c’est qu’être rock en 2006 ?

Philippe Manœuvre : On a créé ça à l’époque parce que le rock était soit-disant "mort". On nous expliquait partout qu’on était dépassé par la modernité, par la techno, par le hip hop, par l’ambiant, etc... Finalement, on s’était dit : "Oui, mais enfin, il reste encore quelque chose !" mais on savait plus quoi... Enfin, les lecteurs savaient plus quoi. Et la question les a aidés à se reconstruire une identité forte. Moi, je l’ai mon identité. Je peux vous dire : être rock en 2006, ce sera lire mon livre, ce sera d’aller au Gibus les vendredis soir... Maintenant, on a même pris l’animation en main.

IR : C’est clairement Rock & Folk l’animation du Gibus ?

PM : Oui, c’est nous qui avons fait ça depuis le début [1]. Quand toutes les maisons de disques nous ont expliqué que c’était fini, qu’il n’y en avait plus, que ça ne passerait plus par eux s’il y en avait. Donc nous, on s’était dit à partir de là que ça devenait extrêmement amusant de leur prouver qu’ils avaient tort. Et de prouver qu’on pouvait mettre des groupes de rock sur une scène et que ça faisait venir des gens qui payaient pour voir ça. On a provoqué un séisme, qui se termine là puisqu’il y a quatre groupes de cette mouvance qui sont signés : Naast, Second Sex, Plasticine et un quatrième en cours de signature.

On a repris les choses... On a vécu la fin du monde nous ! L’année de la fin du rock c’est sans doute l’année 1994, le suicide de Kurt Cobain. Là, il y a une incompréhension générale mondiale. "Qu’est ce que c’est que ce truc où les mecs, une fois arrivés au sommet, se tirent une balle ?". Tout le monde se posait d’un seul coup cette question : "Qu’est ce que c’est que ce rock’n’roll ? Fallait-il en finir avec cette musique aussi mortifère ? ". Après, il y a eu quatre ans de deuil : tous les groupes grunge explosaient les uns après les autres. Même des Faith No More retournaient dans l’underground. Tout le monde abandonnait. Et les maisons de disques ont arrêté de signer des groupes, bizarrement. Les derniers groupes du moment sont tous sur des indépendants : The Strokes, The White Stripes, The Libertines... La production des majors dans le rock est passée d’une quarantaine de projets par an à deux ! C’est pas du pipot ! Cette année, Virgin sort DEUX disques rock : Ben Harper en avril et Lenny Kravitz en octobre.

IR : Pourtant, aujourd’hui, on voit du rock partout, à toutes les sauces ?

PM : Le rock, c’est un code. Un code graphique, ça n’est pas de la musique populaire. Les artistes populaires en France sont tout sauf rock ! C’est Cali, c’est Raphaël, c’est Tryo, c’est Kyo... C’est pas du rock ! (approbation générale) Et pourtant, c’est eux qui vendent un million d’albums.

IR : Dans votre livre La Discothèque Rock Idéale, vous dressez la genèse et l’influence de 102 albums que vous considérez comme incontournables. De quelle manière avez-vous choisi d’évincer certains albums ?

PM : J’ai rien évincé ! Je parle de ce que j’aime ! Donc, j’évince rien, personne a de droits sur moi ! Je reçois des lettres de fous furieux qui ne sont pas contents parce qu’il n’y a pas Police ! C’est moi qui me tape le boulot, c’est moi qui les écrit les chroniques. A Rock&Folk, on sent que les gens ont besoin d’historique. Et puis, j’ai essayé de raconter le rock’n’roll ! C’est pas le rock FM, c’est pas les meilleures ventes... Je pars du principe que les gens ont en moyenne 30 disques chez eux donc souvent les meilleures ventes : Harvest de Neil Young, Legends de Bob Marley etc... J’essaie de faire découvrir autre chose. La première année, c’est facile, les douze premiers qu’on a faits c’était le White Album, Fun House, Electric Ladyland, etc... Mais après, on se pose la question tous les mois : quel disque mettre dans la discothèque idéale ? Il faut un disque qui tienne le choc, qui plaise aux gens. Après, ça peut paraître évident...

Par exemple, il y a Clash. Au moment de faire The Clash, je dis : "Evidemment, on fait London Calling". Et là, Palmer me dit : "Non, ça va pas, London Calling, c’est du Clash qui font un groupe normal. Au départ, c’est pas ça les Clash". C’est vrai que le premier Clash, c’est l’ALBUM des Clash, il y a tout le son Clash. Pouquoi on a besoin de London Calling si on a cet album-là ? C’est vraiment le premier album qui est définitif ! De l’histoire ! Après on peut mettre Combat Rock... mais il y a déjà des synthés, donc déjà les Clash avec des synthés, c’est anti-Clash ! Et ouais ! Rock The Casbah, ça va finir par faire des pubs Levi’s.

Je parle du rock’n’roll, d’un truc rebelle, d’un truc sauvage, qui défrise... La constante de tous ces disques, c’est qu’on peut écouter même les albums de 1956, de 1966, de 1976, c’est les bons ! Mais, il y en a tellement eus de mauvais mais qu’on aimait beaucoup. Y’a des chefs d’oeuvre dont personne ne se souvenait comme Berlin de Lou Reed... Bon, il y a un disque qui est le 102ème, c’est Copperhead, ni comptabilisé ni rien, je voulais me faire plaisir. Mais pour le reste, c’est quand même des albums de toute l’Histoire, vous pouvez pas vous tromper.

IR : On s’attendait quand même à trouver du Bowie : Ziggy Stardust ou Hunky Dory...

PM : J’ai mis Pin Ups parce que l’histoire de cet album est quand même incroyable. La moitié du business, c’est du Pin Ups aujourd’hui : c’est des compils, des rééditions, des remasterisations et des tributes. Il y a un quart de l’industrie du disque qui fait que Pin Ups, tout le temps, tous les mois ! Cet album a tout inventé : la nostalgie, le concept rétro. Il regarde dans le rétroviseur, le rock comme il était avant... Les Who ont d’ailleurs pris des pages de pubs entières pour hurler contre ce disque en disant : " Mais de quoi il se mêle de dire que c’était mieux avant les Who ? Si on veut jouer Anyway, Anyhow, Anywhere on a pas besoin de lui !". Et en plus, ce que me disent tous mes copains qui sont dans la haute fidélité d’exception : " C’est le chef d’oeuvre du son analogique de Bowie ". J’aurais pu mettre Ziggy Stardust mais je pense que que les lecteurs qui font la démarche d’acheter un livre comme ça, ils savent que Ziggy Stardust existe. Souvent, je mets un coup de projecteur sur le disque juste à côté. Ils savent que Harvest existe, je vais leur parler de Tonight’s The Night, etc... Mais, c’est vrai que certains choix étaient assez durs. Pour Pink Floyd, j’ai longtemps hésité entre Dark Side Of The Moon ou Wish You Were Here qui est un disque colossal. Mais on ne peut pas ignorer que Dark Side Of The Moon, c’est là où, nous, qui étions gamins, avons acheté des chaines stéréo pour entendre le son dans les deux baffles ! C’est là où tout le monde s’est mis a écouter Pink Floyd ! C’est l’album qui est resté classé dix ans dans les meilleures ventes !

IR : Il y a une impasse qui est faite entre 1982 et 1987, est ce que ça veut dire que déjà, à l’époque, le rock était mort ?

PM : Non... Il n’y a pas de disque entre 1982 et 1987 ? C’est possible. 1982-87, c’est INXS, c’est Dire Straits, Police... Moi, là, je disparais... En 1987, il y a The Cult avec l’album Electric. Mais, c’est tellement un disque mineur par rapport à Led Zeppelin IV. Qu’est-ce que vous voulez parler d’Electric ? C’est comme si c’était des fans de Led Zeppelin IV qui faisaient un disque... J’essaie quand même de trouver des gens qui font un boulot un peu original quand même : (il feuillette son livre) Les Specials, ensuite on a Prince, les Guns qui ont quand même vachement marqué, les Pixies et Sonic Youth évidemment n’en parlont même pas, les Rage Against The Machine... Mais bon, il faut pas faire comme si mon livre était un disque des Beatles et aller chercher des messages cachés du genre "1982-1987, n’achetez pas !".(rires)

Mais ce que je peux vous garantir, c’est que c’est les bons disques qui sont dedans. C’est les disques avec des chansons qui ont été testés depuis 30 ans pour certains, c’est les BONS disques. On les défend mordicus. Après, tout est ouvert, tout le monde pourra dire : "Je suis pas d’accord sur le Deep Purple ou etc...". L’important, c’est aussi de choisir ces disques qui ont une histoire pour raconter l’Art, c’est pas facile, c’est souvent cher payé. Les pauvres gens qui font des disques y laissent beaucoup. Et au moment où il y a une nouvelle génération qui arrive, qui s’apprête à recommencer le délire, c’est pour leur dire : "Faites gaffe !". Et leur raconter des exemples : des histoires de mixages dans le dos, de coups bas, de coups durs... Mais qu’il faut apprendre un truc : c’est jamais mortel. Et, j’espère que les gens qui lisent ça comprendront que c’est une bataille permanente ! A part trois disques où ça se passe bien dans ce livre. En gros, il y a Sgt. Pepper’s où on leur donne les clés du studio en leur disant : "Allez-y les gars, amusez-vous et faites-nous un beau disque". Il y a aussi King Crimson et Roxy Music, mais à part ça ? Tous les autres disques, c’est que des problèmes ! Problèmes de son, d’engueulades dans le groupe, etc... Un groupe, c’est une entité volatile qui est sujette à plein de problèmes. C’est des gens qui s’adorent et qui se détestent. Fondamentalement, c’est pas possible autrement.

IR : C’est ce qui permet aussi à un groupe d’avancer des fois...

PM : ... Oui... Des fois, puis des fois pas... Des fois il y a trop de haine. Le rock, ça a toujours été la relation entre un guitariste et un chanteur. Quoi qu’il arrive. Le rock’n’roll, c’est un groupe de mecs qui disent : "Toi, t’es le meilleur de notre bande, on va te pousser devant" et après, il y a tous les problèmes que ça peut engager. Quand ils appellent Jimmy Page qui pousse un gamin comme Robert Plant, à un moment, il y a un problème. C’est quand même Jimmy Page la star absolue !

IR : C’est ce qui est très bien décrit dans le film Almost Famous...

PM : Oui ! Voilà ! C’est tout ça les histoire de groupes ! C’est des histoires qui ont existé déjà, des histoires qui sont fabuleuses à vivre. Si on veut faire le tour du monde, un groupe de rock, c’est le meilleur moyen. C’est tous frais payés, surveillés, à boire des coups dans tous les bars à la mode. Voilà... Enfin, j’ai voulu raconter cette aventure en gardant quand même ces disques. Et, c’est soit des trucs que seuls les rock critics connaissent, soit des chefs d’oeuvre un peu oubliés. Personne n’en parle jamais par exemple de ce disque de Sly & The Family Stone. Pour moi, c’est jusqu’où on pouvait aller dans le commercial et en même temps, je me rend bien compte que c’est une utopie anti-commerciale que j’ai fait là... mais qui a quand même trouvé un certain lectorat.

IR : Le livre se vent bien ?

PM : Ah oui ! Quatre éditions ! Du 4 novembre au 4 janvier, il y a eu quatre éditions. En même temps, comme le dit l’éditeur, c’est pas sûr qu’en février il y ait beaucoup de monde pour acheter un livre pareil. Mais il est là, il existe, ça fait une petite référence dans un monde où il n’y avait rien ! Ou alors, on vous dit : "La grande discothèque : 500 références" et tout est chroniqué en deux lignes qu’on trouve sur Internet. Moi, je voulais que ce soit une encyclopédie. Un truc qui n’ait pas de la digest-culture. Je pense que quand on aime la musique, on a pas peur de lire un article de plusieurs pages. Et à partir du moment où on s’est remis à faire ça, beaucoup de jeunes sont revenus vers Rock & Folk.


IR : A propos de Rock & Folk, aujourd’hui, beaucoup de personnes vous reprochent de virer un peu people en racontant tout les mois les dernières aventures de Pete Doherty.

PM : En même temps, c’est souvent les même personnes qui se passionnent pour les aventure de Sid Vicious ou de Kurt Cobain, qui disent "Ah la la, quand il y avait ces grand héros rock etc.". Il est là, le héros rock ! Il a juste changé de nom et de look et c’est Pete Doherty ! De même qu’à l’époque des Sex Pistols, on nous reprochait d’avoir été les interviewer. Parce que ça a été une bataille, le punk en France ; les radios cassaient les disques... Quand Sheena Is A Punk Rocker est sorti, j’étais chez France Inter cet après-midi-là avec Brenda Jackson. Elle a fait tous les bureaux d’un étage, Sheena Is A Punk Rocker, elle le trouvait dans les poubelles ! À la fin, on avait une trentaine de 45 tours ! Aujourd’hui, ça paraît idiot mais c’est vrai ! On l’a vécu, on s’est battu pour ça, contre des gens qui nous expliquaient que la musique, c’était pas ça, etc... Donc, si vous voulez, quand les gens vident l’énergie négative autour de Rock&Folk, je ferme les écoutilles et je taille la route. Et puis bon, Pete Doherty, c’est un toxico et c’est rigolo de suivre un toxico. Aujourd’hui, rien dans le monde d’aujourd’hui n’est fait pour ça ! On est dans un monde moderne, lisse, propre, impeccable, très bien tiré à quatre épingles, personne ne se drogue - on est bien d’accord - personne ne boit... Sauf que ça continue quand même. Je trouve que lui, au moins, il a un truc bien, Doherty, c’est qu’il le fait devant tout le monde ! Il descend d’un avion, il fume un pétard, il va en prison ! Il ne se cache pas, il dit "J’ai besoin d’herbe, je suis un toxico et je fais des chansons". Et ses chansons sont là ! Fuck Forever va rester ! C’est une grande chanson, une des meilleures chansons de l’histoire ! Avec d’autre arrangements, ça faisait un tube énorme ! Simplement, le mec veut pas rester en studio, parce qu’il faut qu’il aille acheter sa drogue, etc... Quand on est venu l’interviewer l’autre jour, il était en train de sortir par la fenêtre... En tout cas, c’est plus rigolo que d’aller voir Mark Knopfler qui est assis avec son dobro et qui nous casse les pieds depuis 1977. Donc bon, des critiques sur Rock&Folk il y en a toujours eu.

C’est comme quand Ungemuth a fait Les 40 Pires Groupes. Au départ, ils se plaignaient comme quoi il n’y avait plus d’écrivains comme Lester Bangs. Et à la fin, ils se plaignent d’Ungemuth qui fait Lester Bangs en l’an 2006... C’est le même ! Un jour, j’étais dans un débat sur Lester Bangs et il y a quelqu’un qui dit : "Est-ce qu’il y a un mec qui a foutu la merde comme Lester Bangs ?". Je le regarde et je dis "Je crois, oui...". Tout le monde attend, et d’un seul coup : "Ah oui !Les 40 Pires Groupes !". Lester Bangs ,c’était un scandale comme ça tous les mois ! Aujourd’hui, les gens voudraient la bonne odeur du scandale mais il faudrait que ce soit politiquement correct. Or, un bon vieux scandale N’EST PAS correct ! Il faut que ça vous secoue, que ça vous mette hors de vos gonds sinon, ça n’a aucun intérêt ! Mais je comprend la douleur des fans aussi. Mais bon, on en est plus là. Quand on parle de Genesis aujourd’hui, il n’y a même plus Genesis, il n’y a que des groupes tribute. Donc, on peut peut-être se décomplexer un peu, calmer le jeu et essayer de voir les choses avec un certain humour. En même temps, c’est vrai que ça fait très mal.

Mais bon, j’arrête pas de me dire, historiquement, les gens ont jamais été content de ce journal. Il y avait toujours un mec pour gueuler. Il y a eu des batailles : la bataille du hard rock, celle du punk...Cela n’a jamais été donné. Même au niveau du rock français, il a fallu l’imposer. Téléphone, Starshooter, Bijou, c’était pas du tout, du tout gagnant ! Dès qu’on les mettait en couverture, les ventes baissaient. Pendant des années, on a pas pu mettre un noir en couverture de Rock&Folk, c’était terrifiant ! A part un noir mort comme Jimi Hendrix. C’est moi qui ai rompu la malédiction avec Tricky. Et là, on a découvert que le public avait complètement évolué... Des fois, on nous dit : "Rock & Folk, maintenant, arrêtez, vous avez 40 ans, vous êtes adultes, tout ce dont vous parlez, ça doit être le socle d’une statue, etc...". Si on fait ça, c’est ce que j’explique dans la préface, est-ce qu’on est encore rock’n’roll ? Je suis pas sûr ! Les gamins n’ont pas à endosser la respectabilité que leur transmettent leurs aînés ! Surtout pas ! Mon père n’est jamais venu me dire :"Tu dois révérer Miles Davis !". Si il était venu me parler de jazz, je me serai sauvé. Cela ne m’intéressait pas ! J’y suis venu trente ans plus tard, très content d’être tout vierge, frais et dispo. (rires)... J’ai fait mon truc à mon heure ! Et je vois pas pourquoi aujourd’hui, je deviendrai le grand Manitou en disant : "J’espère que vous avez tout vos Dire Straits, que vous aimez Yes, que vous aimez Black Sabbath. Tout est bien...". Mais on se ferait chier ! La rock-culture est encore vivante ! La jeunesse a le droit de dire "Mouais, ça me plaît pas votre truc...". On va pas non plus leur enlever ce droit ! Ils n’ont plus le droit de baiser, plus le droit de se droguer, tout le monde a tout fait avant eux... En plus, il faut qu’ils aient du respect ! Attends, c’est pas possible ! C’est pour les anciens combattants le respect ! Nous, on est toujours combattants. On est pas là pour statufier quoique ce soit !

IR : Et par les artistes ? Comment est perçu Rock & Folk ?

PM : En France, que ce soit Pink Floyd ou Pete Doherty, ils se retrouvent tous sur un truc : ils vont parler à Rock&Folk. C’est une revue qui ne les a jamais bullshité. La dernière fois que Pink Floyd a joué au Parc de Sceaux, David Gilmour a demandé à faire trois interviews. On lui a proposé Le Monde, Libé et un autre journal. Et il dit : "Et Rock&Folk ?" "Oh, mais c’est plus ce que c’était..." "Ca existe toujours ?" "Oui" "Eh bien, je veux faire Rock&Folk parce que eux, ils étaitent là en 67 quand on a démarré et ils nous ont aidés. Si ils sont toujours là aujourd’hui, je serai curieux de les revoir." Et on le voit toujours. Là, il fait un album solo, on est invité. C’est génial, parce que c’est pareil avec les Stones et avec Oasis, etc... On a construit un truc, on les a jamais planté !

IR : Et si l’un de ces artistes produit un disque qui ne vous plaît pas ? Comment vous faîtes ? Par exemple David Gilmour en solo...

PM : Aujourd’hui, qui va acheter un disque de David Gilmour en solo ? Cinquante mille fans absolus, ils achètent un grain de voix, un son de guitare... Enfin j’attends, je l’ai pas encore entendu... Mais ce qui est bien, c’est que j’ai des fans absolus. Si David Gilmour fait un album solo, je vais certainement pas lui envoyer Ungemuth, je vais envoyer Soligny, ou Philippe Thieyre... Des gens qui savent, qui vont pouvoir parler avec lui. Ca servirait à quoi de lui envoyer un mec qui lui dit "C’est nul" ? C’est un monsieur de soixante ans qui fait un disque, c’est respectable. On a ce respect, aujourd’hui, on a aucuns problèmes avec l’une de ces popstars. Ca nous a pas empêché de gueuler contre certains trucs de Oasis notamment leur attitude vis à vis de leurs fans. Et je crois que de toute la presse française, il nous adorent. Oasis nous aime beaucoup, les Libertines nous aiment beaucoup... Et c’est normal puisque Rock&Folk a toujours été écrit par des gamins fanatiques. Mais, j’ai jamais été déçu par ces gens-là. Jamais. C’est pour ça que je continue. Pourtant, il y a des gens très bizarres là-dedans... Mais enfin, franchement quand même, c’est des gens bien, ils vieillissent bien...

IR : Justement, comment font-ils pour vivre aussi vieux tout en restant en pleine forme ?

PM : Il y en a qui sont fatigués quand même. Keith Richards, il est très fatigué sur la dernière tournée. C’est un peu tristounet. Mais, il y en a qui sont encore frais.

IR : C’est étonnant pourtant quand on voit ce que beaucoup ont ingurgité...

PM : Comme dit Garnier, ceux qui sont encore vivants seraient donc des imposteurs ? (rire retentissant - plusieurs tête se tournent dans la brasserie vers notre Philippe national qui continue comme si de rien n’était). Mais si ! Ils sont encore vivants ! "Donc, vous fricotiez pas tellement avec la came puisque vous êtes encore là soixante ans après !" (ton moqueur). Mais il y en a aussi pas mal qui arrêtent à un moment donné. Mick Jagger a tout arrêté en 1985 (les drogues, les pétards etc...) et il s’est mis au jogging. Quand vous êtes chanteur, vous allez porter la responsabilité d’un boulot. Mais qui reste ? (il feuillette son livre) Jimmy Page peut plus porter sa guitare ; Joe Strummer : mort ; Bob Marley : mort ; Heartbreakers : 3 morts ; Sex Pistols : 1 mort ; Wire : existe encore ; Suicide : existe encore ; Kraftwerk existe toujours ; Motörhead : il est vivant mais pas en bon état ; Michael Jackson : c’est quand même le plus dingue de tout le lot, le plus freaky freaky ; Gang Of Four s’est reformé mais ça va pas ; Ramones : 3 morts ; Cramps : 1 mort ; Diana Ross est là ; Joy Division : 1 mort ; AC/DC : 1 mort... Vous voyez, on a payé notre tribut quand même ! C’est lourd ! Il y a eu une casse humaine incroyable ! Enfin, toutes les années 70, on a dit aux mecs : "Bon t’arrêtes, tu fais ton truc rapidement parce que de toute façon ça va pas durer". Personne n’aurait pensé que Pink Floyd en 2006 tournerait encore, ou les Stones...

IR : En parlant de Pink Floyd et puisque vous avez des contacts privilégiés, vous avez annoncé, il n’y a pas si longtemps, qu’ils allaient se reformer...

PM : Il devait y avoir la conférence de presse en janvier. Avec les quatre. Avec Waters. Ils devaient présenter PULSE, et en fait tout est annulé parce que Gilmour va faire son album solo d’abord. Et après, il y aura la conférence de presse sur PULSE. PULSE est même plus au programme. Mais quand je l’ai dit il y a un mois et demi, j’avais mon billet de train pour aller à Londres avec Jérôme Soligny à la conférence de presse, c’était vrai et depuis, ça a été reporté. Et il y aura une reformation scénique, je pense. Et pas juste pour des évenements comme le Live 8. Il y aura une mini vraie tournée, je pense.

IR : Vous pensez ou vous en êtes sûr ?

PM : Je pense, j’en ai la très forte impression.

IR : Leur reformation au Live 8 vous a surpris ? Quand vous l’avez apprise ?

PM : Quand je l’ai appris, ça m’a pas tellement surpris. Je sais que c’est vraiment une des très grande formations mythiques. Jagger a toujours dit que Pink Floyd était aussi important que les Stones. Il l’a dit deux fois dans mes interviews. Je disais : "Quand même, les Stones, quelle descendance !" et il répondait "... Et Pink Floyd ? Parce que, quand même Radiohead, ne me dites pas que ça vient des Stones...". Il disait que Pink Floyd a eu autant d’importance que les Stones. Il y a eu un nombre incroyable de groupes qui sont partis dans le psyché, qui ont fait des constructions mentales, des chose qui n’ont rien à voir avec le blues et les progression du blues...

IR : Mais, au niveau des relations du groupe, ça vous a pas surpris ? Parce que quand même, elles étaient assez tendues... Même si la presse a parfois un peu amplifié les choses.

PM : Non... Mais, je pense qu’il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis. Et Roger Waters, c’est tout sauf un idiot. C’est un grand bonhomme absolu qui a un problème de relationnel. Mais quand il ont vu ce qu’ils faisaient ensemble... De toute façon, c’est terrible, les gens mettent le temps à s’en rendre compte : quand vous êtes un Pink Floyd, c’est comme dit Johnny Rotten dans le prochain Rock & Folk, "Je serai toujours un Sex Pistols.". Aujourd’hui, il ne parle jamais aux autres membres du groupe sauf quand ils font une tournée et là, ils sont entre potes et il refont le truc des Pistols... Et Pink Floyd, c’était pareil. On l’a vu, c’était sublime ce concert... Je peux vous le dire, j’ai pleuré comme une madeleine... Il y avait de quoi pleurer sur l’instant. C’est tellement beau cette musique, c’est quelque chose qu’on a tous dans nos chromosomes et si ils veulent le refaire c’est magique ! C’est un grand beau moment !


IR : Sans transition, on vous voit souvent sur les plateaux TV, pour parler de Michael Jackson ou de Madonna ? Est-ce que ça vous plaît ou est-ce une contrainte ?

PM : Non, on m’appelle, on me demande... Mais je le fait, parce que dans le cas de Jackson, j’ai quand même écrit un livre sur lui, c’est moi qui ai passé ses premiers clips et je suis le seul journaliste en France qui l’ait rencontré. Mais, j’en ai refusé beaucoup plus. J’en ai fait deux sur Jackson et une sur Madonna. Mais, les gens m’en parlent tellement comme si c’était une espèce de honte. Mais le problème, c’est que j’ai déposé des projets d’émission sur les Brats, les Naasts, les Second Sex... Personne ne me rapelle... Dès que je dis : "On va faire un truc sur Jackson ou Madonna", tout le monde veut ! C’est le drame de la télévision. Mais, on ne m’appelle pas pour parler de trucs intéressants. Si, sur Direct 8 il n’y a pas si longtemps, on m’a invité pour parler de McCartney, j’étais très content.

IR : Vous préfèreriez être appelé plus souvent mais pour d’autres groupes ?

PM : Ah oui ! Bien sûr. Même mettre en scène. Mais, on va s’en occuper. On a ramené le rock, maintenant les groupes sont signés. Mais, ils ne vont pas s’arrêter. Ils vont partir en tournée et moi, je vais suivre un peu l’affaire avec une caméra. Ca m’amuse, leur aventure m’amuse. Après, on va sortir un DVD dans le Rock & Folk ou peut-être en vente, à côté, je ne sais pas encore. Mais, on va filmer la tournée Province-Paris, ça va être trop drôle.

IR : Mais, est-ce que en dehors de cette scène (Brats, Naast, Second Sex, etc) qui ont un style de rock quand même assez sauvage, vous surveillez aussi les nouveaux groupes (genre electro rock etc...) ?

PM : Nan, l’electro rock, je n’y crois pas. Incroyablement, on revient toujours à Air. C’est Air qui fait le meilleur truc, avec des vieux instruments... D’ailleurs, je viens d’entendre un nouveau morceau de Air. Encore une fois, il n’y avait pas un instrument de plus de 1970 et j’ai jamais entendu un truc aussi futuriste. Comment ils font ? Je ne sais pas. C’est des génies. Mais on aime bien autre chose. Comme on est dans les groupes de Paris, il y a des groupes comme Nelson. Ça y est, ils sont signés et ils sortent un album dans deux mois. Ça n’a rien à voir avec le garage punk, c’est de la noisy-pop, mais bien sûr qu’on va en parler. Bon, il s’avère que tous les groupes du Gibus, leur idée est de faire des chansons des Beach Boys avec la patate des Stooges. C’est ce qu’ils disent tous. C’est un beau but ! Si ils y arrivent, bravo. Parce que, attention, ça va pas être facile à faire en studio. Mais ça ne nous empêche pas de parler de Nelson et de découvrir Mickey 3D dans les auto-produits. C’est quand même nous qui avons sorti Mickey 3D. Si vous voulez, il y a des trucs de coeur, et d’autres où on reconnait que c’est bien. Maintenant, on est pas les Champions du Monde du prog. Mais, si on trouvait un bon écrivain prog, on le publierait... Le problème du prog rock, c’est qu’au début, c’était Paringaux et Adrien qui écrivaient les grands articles mythiques sur Procol Harum ou King Crimson... Deux des meilleurs écrivains de tous les temps. On a jamais eu mieux en France. Et quand ils écrivaient dix pages sur Procol Harum ou Magma, on y croyait.

IR : Dans Almost Famous le personnage de Lester Bangs a une théorie comme quoi, les rock critics ne sont pas cool.

PM : Non, on n’est pas cool. En tout cas, Lester Bangs, dans le film, est une reconstitution parfaite du bonhomme. Mais, il y avait plein de Lester. Le problème de Lester Bangs était le même que celui de certains rock-critics français. Il avait raison le mois où ça sortait, le mois d’après, il avait changé d’avis. Mais, il était capable de changer d’avis et de le reconnaître. Notamment sa fameuse critique de Kick Out The Jams qu’il a passé tout sa vie à expier. En fait, il voulait tellement écrire pour Rolling Stone qu’il a démoli un groupe exactement comme Rolling Stone le voulait, une fois que c’était publié, il s’est rendu compte que, oui il avait un nom, mais il avait tort ! Et c’est terrible de se gourer ! Moi, je me suis trompé sur les Cure, je me suis trompé plein de fois.

IR : ... et les Ramones...

PM : Sur les Ramones aussi. Je trouvais ça comique au départ. On avait besoin de nouveaux Stooges, pas besoin de mecs avec des T-shirts Mickey ! C’était donc des Mickeys ! Donc, j’avais piqué ma crise... Exactement au même moment, Nick Kent disait que c’était génial et que c’était exactement ce qu’il fallait faire. Et d’albums en albums, Nick Kent perd tout intérêt. Arrivé au Live, il dit :"C’est fini, je marche plus dans le cartoon". Et moi : "Alors là, c’est incroyable. C’est vraiment un vrai cartoon. Ils se sont mis à accélérer le concert. En 39 minutes, ils ont joué quatre albums... C’est du Tex Avery ; moi, ça m’intéresse." Fondamentalement, nos voies se sont croisées. Je suis devenu pro-Ramones à partir du Live et Nick Kent anti. En même temps, je m’étais pas trompé sur les Pistols, etc... Enfin, après vous vous balladez en disant : "C’est moi qui ai lancé le Velvet" "Où ?" "Par la fenêtre"... (rires). Un journaliste lance rien ! On contribue à l’effort de guerre ! C’est les groupes qui se lancent eux-mêmes. Brian Jonestown Massacre, on peut vous en parler en long, en large et en travers. Ils ont donné un concert monstrueux à Rennes. Mais d’une force ! Et là, tous ceux qui ont vu le concert en parlent. C’est tout. C’est ça, le boulot. La scène, c’est le sérum de vérité d’un groupe.

IR : Il vous arrive de redescendre dans la fosse de temps en temps ?

PM : Évidemment. Aux dernières Transmusicales, j’étais au premier rang, tout le temps. Pogoter, je m’en fous, ça n’a jamais été mon truc, même en 1977, je ne pogotais pas beaucoup. Parce que je suis quand même là, en observateur. Je suis pas là en touriste ou en acteur. Je suis pas là uniquement pour prendre du plaisir, il faut quand même aussi que j’observe. Paringaux avait très bien définit ce boulot. Il disait : " Il y a le public, il y a les artistes et nous, on est dans cet espèce de no man’s land avec trois videurs". On voit ce que fait l’artiste, on écoute, ça prend ou ça prend pas. Des fois, ça cartonne, les gens comprennent tout et ils suivent l’artiste. Des concerts comme ça... En 1995, il y a les Smashing Pumpkins : extra-ordinaire, total ! Il y a Nirvana au Zénith aussi, bien sûr. Il y a des concerts comme ça où tout marche ! L’artiste arrive, il rigole, la salle rit avec lui, il dit un mot tout le monde reprend... Il y a une ambiance, il y a un "moment de moment" comme dit Johnny Halliday. (rires retentissants) On a toujours pas réussit à le résumer mieux... C’est des Moments de Moments...

IR : Que pensez vous de la qualité au niveau sonore des salles parisiennes ?

PM : Ça dépend toujours de la sono du groupe. C’est les groupes qui amènent ou pas la bonne sono. Par exemple, les Stones à Bercy, c’était une catastrophe alors que R.E.M., c’était sublime. Donc, c’est pas la salle qui est en cause. Les Cramps à l’Élysée Montmartre, on n’entendait rien et il y a des fois ou c’est génial. Il faut savoir aussi que dans les salles, il y a des mouchards reliés à la Préfecture de Police. A l’Élysée Montmartre, il y a des micros reliés au commissariat ; si ça dépasse les 102 décibels, les flics viennent fermer la salle. Donc, vous avez des groupes qui vont mettre une écharpe sur les mouchards et qui jouent à 102 dB comme ça, les flics n’entendent rien. C’est pas gagné en France ! On n’est pas dans un pays rock’n’roll ! On est des résistants.

IR : Et que pensez vous des concerts parisiens ? Je trouve parfois l’ambiance un peu entachée par quelque bobos qui sont casse-l-ambiance... Comme aux Whites Stripes par exemple.

PM : Ça bougeait devant pourtant, les kids... Mais, c’est le problème des Whites Stripes, c’est qu’ils ont deux publics : ils ont le public Rock & Folk et le public Inrocks... Il y a les deux. Il y avait du bobo assis qui se disait (il prend un ton précieux) : " C’est très bien, c’est du blues déstructuré, je crois"... (rires) Et puis ils attendent le tube, aussi. Les Whites Stripes sont victimes de ça, c’est le groupe qu’il FAUT voir, pour après dire en dîner (ton précieux) : "J’ai vu les Ouailles Straillpes, on y était...". Mais bon, en même temps, on va pas les tuer, on peut pas être tous branchés pareils. C’est pas grave. L’important, c’est que ce groupe aurait pu faire Bercy et ils n’ont pas voulu. C’est des groupes qui continuent à faire quelque chose qu’on aime bien. Même si sur Rock&Folk, on a fait un article où on se demande comment ça peut évoluer avec une batteuse aussi nulle. Quand on a un grand guitariste comme ça, si il prend une mauvaise rythmique, il ira jamais nulle part ailleurs.

IR : Mais on disait la même chose de Moe Tucker aussi...

PM : Et de Van Halen ! Et Van Halen, il aurait eu un bon batteur, on sait pas où ça aurait été... Mais là, l’article posait une vraie question de musicien en disant : "Avec une dame qui joue aussi mal, qu’est-ce qu’il va faire, l’autre ?". Et l’autre, justement, c’est bien ça qu’il veut faire. Il veut creuser le sillon, il est bien dans son espèce de truc... C’est intéressant comme question.

IR : Quel est le pire qui puisse arriver au rock selon vous ?

PM : Aujourd’hui, la magie disparaît de plus en plus. On arrive à des recettes, des ficelles... Par exemple dans le cinéma, il n’y a pas un film qui sorte sans qu’il ait été testé avant sa sortie en salle. On te donne une carte : " La fin vous a plu ? Tel personnage vous a plu ? etc...". Donc bientôt, on peut imaginer qu’on réunira trente mecs. "Tenez, voilà le nouveau disque. Le solo vous plaît ? Plus long ? Plus court ?". Je voudrais pas que le rock tourne comme ça. Que le prochain disque des Naasts soit jugé par un panel. Attendez... Le rock, ça a toujours été des mecs en studio. Il y a toujours le même truc : une maison de disque ou un manager qui débarque en disant : "Attendez les mecs, on peut pas faire ça ! Ca n’a jamais été fait !". Et le groupe de répondre : " Si ça n’a jamais été fait, c’est nous qui allons le faire ! ". C’est l’anti-marketing absolu. Et c’est ça, le rock’n’roll ! Et après, on a un solo de batterie de 20 minutes, un double CD avec des morceaux acoustiques... " Ça n’a jamais été fait donc je dois le faire "... C’est ça, le rock’n’roll. Ça a toujours été ce côté un peu dingue, un peu maboule.

IR : Et bien, merci Philippe Manœuvre d’avoir répondu à nos questions. À bientôt.



[1Les soirées au Gibus reprendront tous les vendredis soir à partir du mois d’avril. Ces nouvelles sessions verront l’arrivée de nouveaux groupes, dont une dizaine de province.

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