Incontournables
Psychocandy

Psychocandy

The Jesus And Mary Chain

par Milner le 7 juin 2006

paru en novembre 1985 (Blanco Y Negro / Warner)

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Un testament, ou ce qu’il en reste. La noisy pop dans son plus bel éclat, celui qui perpétuait avec abnégation l’esprit de dépersonnalisation du rock né en 1977, et bien vite oublié par la plupart. La suite prouvera que dorénavant, il n’est question de faire du rock que dans l’unique but d’être une star ! Ainsi, imaginer l’effet que produit Psychocandy au grand public à sa sortie relève d’un mystère impénétrable, pour peu que la première écoute se produisit après la bataille. Car, à une époque où les rockers ne trouvaient strictement plus de petits bouts de viande à se glisser entre les quenottes autrement aiguisées dans le passé par des mets de choix tels que Louie Louie ou Blitzkrieg Bop, le premier album des Écossais fit facilement la différence ; de par ses influences (The Velvet Underground, The Ronettes) et par ses compositions. En effet, quel autre groupe que The Jesus And Mary Chain peut se targuer d’avoir créé une nouvelle scène musicale sans l’avoir aussi peu désiré ?

Bercé par la bande à Lou Reed, le quatuor a alors la bonne idée de ressortir les larsens et les guitares fuzz pour nous délivrer leur premier album. Seuls dans leur coin, ses membres s’apparentent à des miroirs pointés comme des reproches sur l’Angleterre des Nouveaux Romantiques et de la toute puissante MTV. Le long de quinze titres impeccables de réalisme, The Jesus And Mary Chain exprime parfaitement la quintessence de cet ennui profond de toute une jeunesse, ce « No Future » devenu enfin réel. Sur fond de pulsations et de feedbacks inspirés par le groupe protégé de Warhol, de subtiles mélodies façon Beach Boys accompagnent une musique gorgée d’échos, telles les réalisations d’un Phil Spector. En tout cas, c’est une riche idée ! Il est question ici de chansons anti-pop mais pure pop en même temps : Just Like Honey (et son intro calquée sur le Be My Baby des Ronettes tandis que Jim Reid déclame son chant tiré du fin fond des chutes de Niagara) ou son alter presque ego (Sowing Seeds), Taste Of Cindy (et son chant tout en la-la-la) ; autant d’images d’un désarmement psychologique.

Les autres titres, plus lourds, ne sont pas en reste : noyé dans la force, la voix de Reid se bat comme un forcené pour tenter de faire passer à ses imprécations définitives le mur du son du groupe sur Inside Me. Never Understand et son final psychotique ont dû procurer de drôles de sensations aux jeunes membres du Black Rebel Motorcycle Club. La perle rare de l’album prend les traits de My Little Underground, un rock pas commun qui débute sur une ligne de guitare monstrueuse, la basse lourde cimente des trames de tension pesante tandis que la batterie résonne dans la boîte crânienne. Surtout pas une production de machine calibrée sans âme...

Indiscutablement, jamais un groupe n’avait semblé être si proche de l’esprit qui entourait la musique du Velvet Underground : un chanteur qui ressort ses textes d’une façon laconique tellement proche d’un Lou Reed, un guitariste qui prend un malin plaisir à placer du feedback partout où il y a de la place, un bassiste qui fait danser la rythmique et un batteur (un certain Bobby Gillespie qui officiera par la suite au sein de Primal Scream en tant que ... chanteur) qui s’approprie le « style » Moe Tucker, c’est à dire qu’il rend sa partie de batterie totalement dépourvue de complications, en terme de pure économie, il n’a pas besoin d’en faire plus. Le minimalisme à l’état pur. Qui donnera naissance par la suite au mouvement shoegazer et à une série de petits clones le millénaire suivant (BRMC donc). Durer sans s’étioler, le pari de The Jesus And Mary Chain est tenu. C’est suffisamment rare pour être remarqué. Psychocandy est tout simplement une machine à fabriquer des primitifs urbains, son rock a la couleur de l’ombre et ses chants désespérés sont souvent les plus beaux.



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Tracklisting :
 
1- Just Like Honey (3’00”)
2- The Living End (2’14”)
3- Taste The Floor (2’54”)
4- The Hardest Walk (2’36”)
5- Cut Dead (2’45”)
6- In A Hole (3’01”)
7- Taste Of Cindy (1’39”)
8- Some Candy Talking (3’15”)
9- Never Understand (2’58”)
10- Inside Me (3’08”)
11- Sowing Seeds (2’47”)
12- My Little Underground (2’30”)
13- You Trip Me Up (2’22”)
14- Something’s Wrong (4’00”)
15- It’s So Hard (2’35”)
 
Durée totale : 42’24”