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mercredi 15 avril 2015
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par Our Kid le 27 septembre 2005
paru le 15 septembre 1967 (Pye)
En plein été 1967, The Kinks semblent déjà être passé à autre chose. Alors que tous les groupes célèbrent l’amour et la musique, Ray Davies, en chroniqueur avisé, nous renseigne sur la vie en Angleterre cette année-là. Et c’est ici que la singularité de cet album s’opère. Totalement fermé aux influences psychédéliques, comme le suggère la pochette peu flamboyante comparée à celle de Disraeli Gears ou Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band, Something Else présente également un contenu austère, rempli d’idées noires. Là est la question : est-ce que Ray Davies réagit avec 20 ans de retard ou cinq d’avance ?
Il est vrai que les titres des chansons sont révélateurs : End Of The Season, No Return, Lazy Old Sun. Effectivement, à l’opposé des thèmes de l’époque prônant l’évasion par le rêve, les voyages en Inde ou dans la stratosphère, The Kinks reste bien plus terre à terre dans son inspiration. Il est question ici du stress de la vie londonienne (David Watts) - reprise par The Jam en 1978 - à travers différents personnages, Harry Rag, Terry et Julie (Two Sisters), et de traditions qui se perdent (Afternoon Tea). Le groupe entrevoit également l’universel sujet des difficultés vécues par des couples à cause des belles-mères (Situation Vacant), tout cela, traité avec leur inimitable humour britannique.
Sans posséder de concept défini, cet album présente une diversité de styles, révélatrice de cette période de liberté artistique. Ainsi, on y trouve de la bossa nova (No Return), une fanfare militaire (Tin Soldier Man) , une jazzy triste à la Sinatra (End Of The Season), pop classique et le tube Waterloo Sunset, l’une des meilleures chansons du siècle dernier, le Yesterday de Ray Davies, mis en boîte en une prise... C’est d’ailleurs ce dernier qui se charge, pour la première fois, de la production de l’album après la fin de la collaboration avec l’Américain Shel Talmy. L’autre nouveauté réside dans la participation plus active de Dave Davies, le cadet de Ray, dans les compositions du groupe, telles Death Of A Clown ou Love Me Till The Sun Shines, rompant avec l’image des deux frères se battant sans cesse. On retrouve les tensions entre les deux guitaristes dissimulées sous les traits du morceau Two Sisters, au raffinement très...kinksien.
On s’en doutait, mais Something Else, éprouva des difficultés à émerger au milieu des productions qui proliférèrent durant cet été de l’amour, pas aidé en cela par l’apparent refus du groupe d’adhérer à l’idéologie hippie. Après avoir tenté de suivre The Beatles, Ray Davies réalise à ce moment-là que leurs destins ne se croiseront désormais plus, conférant au titre de l’album toute sa lucidité. Un disque à contre-courant de l’époque, donc, mais qui fera des émules plus tard avec des groupes comme Madness ou Blur, les autres grands chroniqueurs de la société de sa Majesté Elizabœuf. Souvent oublié, cet album tient pourtant son rang en cette année lysergique.
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