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mercredi 15 avril 2015
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par Oh ! Deborah le 11 mars 2008
paru en 1983 (Animal), réédité en 2004 (Sympathy For The Record Industry)
A ce moment là, le Gun Club vit ses jours les plus décadents. Le line-up du groupe est, comme son chanteur, changeant, titubant aux moindres notes, prêt à se briser en mille morceaux. Perdu quelque part entre Miami et The Las Vegas Story. Jeffrey Lee Pierce ne s’entend plus avec Ward Dotson et Rob Ritter. Patricia Morrison arrive, Kid Congo réapparaît pour les concerts mais, membre à plein temps des Cramps (qu’il quittera un an plus tard), il n’est pas encore un membre du Club à part entière. Sans toutefois qu’on lui demande de remettre en cause sa participation chez Lux Interior.
Jeffrey se dit exténué par l’ennui, les tournées, l’alcoolisme et l’héroïne. Mais il veut continuer. Car il est devenu une petite icône local à Los Angeles, suscitant quelques jalousies chez les autres groupes crâmés, d’ailleurs il va régulièrement à New York, où il a un petit public.
Là, Chris Stein va l’inviter une fois de plus dans son studio, afin d’enregistrer un EP de cinq chansons avec Jim Duckworth (Panther Burns) à la guitare, Jimmy Joe Uliana à la basse, et Dee Pop (Bush Tetras) à la batterie. Ce line-up ne résistera pas, Jim et Dee décidant de fuir les addictions de Jeffrey quelques temps après l’enregistrement. Comme pour Miami, Chris Stein fera paraître ce Death Party sur son label Animal. Jeffrey semble toujours fan de Blondie. En plus, il affirmera que « La seule personne qui nous a vraiment aidé, sans jamais rien attendre en retour, est Debbie », la supposée amoureuse secrète de Jeffrey lors des tous débuts de Gun Club. Amis de Jeffrey, des Ramones et d’Iggy Pop, Chris et Debbie Harry ont surtout bon goût.
Cet EP est (ou était) un objet de collection. Jamais sorti sur CD jusqu’en 2004, Sympathy For The Record Industry remédia à la chose avec, en plus, sept morceaux live funestes et nébuleux qui vont faire de cette œuvre le point noir de la discographie du groupe. Noir, car jamais un album du Gun Club, en plus d’être génial, n’a été plus souterrain. Plus descriptible d’une multitude de péchés, de soirées confidentielles passées dans l’obscurité d’un détachement incontrôlé. Où le passé, l’avenir, et même le présent, n’existent plus. La guitare de ces cinq titres est rachitique, se donnant des airs dérisoires et décharnés mais suffisamment lugubres pour qu’on l’évoque. Jeffrey chante comme s’il était ivre sur The Lie ou la maudite Death Party. Hypnotiques, perpétuelles... Cette dernière durera 10 minutes parmi les lives les plus cafardeux qu’on ait pu entendre. Et Jeffrey qui s’abandonne avec, toujours, la même grâce, car il n’a rien à perdre. Et tellement à donner. Et la basse de Patricia qui gronde et rampe comme un reptile venimeux...
Strange Fruit, de Lewis Allan, est reprise en live. Les concerts du Gun Club pouvaient s’avérer inégaux selon l’état du chanteur. Bien sûr les extraits live ici (bien qu’on y entende un Jeffrey pianiste) sont moins indispensables que l’EP d’origine, qui offre tant de mélodies déchirantes, (notamment celles de The Light Of The World), servies par une production plus maigre que sur les deux albums antérieurs. Elle n’était pourtant déjà pas mirobolante, mais permet ici d’imaginer l’aura dépravée qui devait régner lors de l’enregistrement sans peaufinage, réalisé en temps limité. Chaque titre (studio donc) est, comme un emblème, tour à tour le préféré des fans. Come Back Jim aurait pu figurer dans Fire Of Love.
Tout le monde se souviendra de la ballade The House On Highland Ave. Serait-elle plus belle que la future ballade Lucky Jim (de l’album du même nom) qui elle-même est moins grandiose que The Breaking Hands (Mother Juno) ? Toutes ont en commun d’être des slows tétanisants. Alarmants de beauté. The House... orne cet album avec un xylophone discret et des textes retraçant l’histoire d’un meurtrier, traînant ses proies dans les sous-sols de L.A. Et Jeffrey en sermonneur, lui chantant qu’il n’y a pas de flamme dans ses yeux glacés.
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