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par Emmanuel Chirache le 10 avril 2007
paru en janvier 2007 (Delabel/EMI)
On aime Arno un peu comme on aime un nourrisson. On ne comprend rien à ce qu’il veut nous dire, mais on trouve ça touchant. Car Arno est définitivement touchant, avec son accent flamand à couper au couteau, sa tronche de Jacques Higelin qui aurait piqué la voix de Tom Waits et la réserve de whisky de Gainsbourg, ou encore ses chansons si singulières. Parmi elles, quelques pépites à connaître, comme par exemple Putain Putain, qui date du temps de son groupe TC Matic, mais aussi Les Yeux De Ma Mère, Je Veux Nager, Chic Et Pas Cher, qui déclinent un univers à la fois émouvant et épicurien.
Trois ans après French Bazaar (un temps immensément long pour ce chanteur prolixe), Arno revint avec Jus De Box, album dont le titre en forme de jeu de mots nous invite à piocher dans un attelage hétéroclite de chansons qui résumerait plus de trente ans de carrière. « Cet album est comme un jukebox, dans le sens où chaque morceau est différent, explique le chanteur. Il y a un peu de mon passé : les seventies, les eighties, du TC Matic et aussi beaucoup de maintenant - C’est tout le contraire d’un concept album. » Pourtant ressort du disque une grande homogénéité, due notamment au lissage de la production et à la prépondérance des guitares de Geoffrey Burton.
D’où un nivellement global vers le moyen, qui rehausse les mauvais morceaux et abaisse les meilleurs. Ainsi entre le sympathique single Mourir À Plusieurs et un titre très passable à l’image de Hit The Night, il n’y a finalement pas la ligne de Longchamp, comme disent les commentateurs de foot. La différence est ténue aussi entre l’excellent Miss Amérique, qui rappelle l’Arno qu’on aime avec son refrain choral et ses paroles allumées (« c’est mieux d’être avec une moche souriante que avec une femme belle et chiante. J’ai tout compris, oui j’ai dormi avec Miss Amérique »), et le rap-metal surprenant I’m Not Into Hop en duo avec Faf Larage. Qu’il soit là où on l’attend ou non, Arno apparaît ici avant tout comme trop sobre. Sans être totalement décevantes, ses chansons ne soulèvent pas un enthousiasme débordant, il leur manque la douce folie qui nous avait marqué autrefois. Et quel intérêt de dédoubler une chanson en versions française (Reviens Marie) et anglaise (Help Me Mary) strictement identiques, si ce n’est masquer un manque d’inspiration que nous souhaitons provisoire.
Avec Jus De Box, le cours de l’Arno devient soudain calme, son débit perd son habituel rythme irrégulier et invite à la promenade fluviale alors qu’une forte pluie suffirait à le transformer en torrent inondant tout sur son passage. Il ne reste plus qu’à espérer que d’ici le prochain album du Belge, il pleuvra comme vache qui pisse.
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