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mercredi 15 avril 2015
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par Brice Tollemer le 14 novembre 2006
Paru aux États-Unis sous le titre The Naked And The Dead au mois de mai 1948 ; paru en 1950 en France aux éditions Albin Michel, 665 pages.
Le premier ouvrage de Norman Mailer (publié alors qu’il n’a que 25 ans et pour lequel il reçoit le Prix Pulitzer) est sans conteste l’un des plus grands livres qu’ait inspiré la Seconde Guerre Mondiale. Ayant lui-même participé au conflit le plus meurtrier de l’histoire du monde en étant engagé dans le Pacifique Sud, l’auteur nous offre une vision réaliste et sans ambages de la bataille qui fit rage entre les États-Unis et le Japon impérial. En contant l’histoire d’une section de reconnaissance envoyée en mission derrière les lignes nippones, Mailer réussit à mêler adroitement épopées guerrières et histoires personnelles de ces soldats, véritables « troufions » aux ordres de l’Oncle Sam. Le Juif new-yorkais, l’immigré mexicain, le Texan rural, tous ont comme mission de conquérir la petite île d’Anopopéi. Mais cet objectif est cependant la seule chose qu’ils aient en commun.
En effet, Les Nus Et Les Morts n’est pas seulement un roman guerrier, c’est aussi un implacable tableau de ce qui compose la population américaine de cette période, où peut régner un antisémitisme ambiant, où l’on ne croit plus aux femmes, où les enfants se font battre par des paternels alcooliques. Cependant, et c’est une force de ce récit, aussi différents que soient tous ces soldats, aucun d’entre eux ne va contre les ordres des officiers et s’acquittent tous de leur tâche militaire.
La rédaction de l’ouvrage est tout à fait caractéristique : durant la guerre, l’auteur, mobilisé sur le front, a ainsi observé la vie quotidienne des soldats et les a interrogés sur leurs impressions, leurs angoisses et leur sexualité. De retour au pays au mois de mai 1946, il s’enferme tous les matins dans une petite pièce pour se consacrer à l’écriture. Sa femme rapporte qu’il « est le type même de l’écrivain obsessif et non inspiré ». En effet, il rédige des fiches avec la « biographie » détaillée de tous ses personnages et prévoit par avance le nombre de chapitres et leur contenu. Le roman est ainsi d’un réalisme effrayant, le langage est cru, les descriptions précises et la guerre une formidable machine à broyer.
Norman Mailer a ainsi su parfaitement saisir tout ce qui fait l’ambiguïté et le caractère insaisissable de ces « frères d’armes », dont le seul dénominateur commun est d’être empêtré dans cette jungle japonaise, à des milliers de kilomètres de leur bannière étoilée et d’un quelconque souci de liberté.
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